Inflation: la bataille des salaires débute entre les syndicats et les entreprises
Les syndicats comptent bien arracher des augmentations similaires à l’inflation
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Le patronat ne s’attend pas à davantage de conflits de travail avec des hausses salariales de 4,1 % en 2023, bien en dessous de l’inflation. Du côté syndical, on anticipe plutôt des négociations difficiles.
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«Je ne pense pas que cette situation va générer plus de conflits de travail. Il y a beaucoup d’autres éléments qui ont vu la situation des travailleurs s’améliorer sans juste regarder la partie augmentation salariale. [...] Les employés ne sont pas perdants», soutient Karl Blackburn, PDG du Conseil du patronat (CPQ).
L’association des patrons du Québec publiait hier les résultats de son enquête annuelle: les employeurs prévoient un budget moyen de 4,1 % d’augmentation salariale pour 2023, excluant les gels.
«C’est une hausse très importante, estime M. Blackburn. C’est nettement plus élevé que les neuf dernières années.»
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Pourtant, ces estimations sont en dessous du niveau d’inflation actuel. Ce dernier pointait à 7,1 % pour la province au mois d’août. Même s’il faudra attendre janvier pour connaître la donnée finale de 2022, Daniel Boyer, président de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ), s’inquiète déjà.
«Ma crainte, c’est que les salaires ne suivront pas nécessairement l’inflation. Il y aura une perte de pouvoir d’achat. Et c’est encore plus vrai pour les plus bas salaires», lance-t-il.
Le dirigeant syndical voit poindre à l’horizon un plus grand nombre de conflits de travail et des négociations «très difficiles».
M. Boyer rappelle que de nombreuses négociations sont à venir, notamment dans le secteur public et la construction, des domaines particulièrement touchés par la rareté de la main-d’œuvre.
Plus de 2000 négos prévues en 2023
Plus de 2000 conventions collectives seront échues l’an prochain, d’après le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale. Au Québec, 40 % des travailleurs étaient syndiqués en 2021, d’après les données de l’Institut de la statistique du Québec.
«Les travailleurs voient l’inflation et s’attendent à ce qu’il y ait des augmentations importantes, ils vont être exigeants», affirme le président de la FTQ.
Le syndicaliste perçoit déjà une hausse des conflits de travail, mais aussi du nombre d’ententes de principe qui sont rejetées par les assemblées, ce qui est habituellement plus rare. «Les comités de négociation ont conclu des ententes avec les employeurs, mais ça ne fait pas l’affaire des travailleurs et travailleuses», explique M. Boyer. Il y voit un signe avant-coureur de conflits à venir.
Du côté de M. Blackburn, on considère que, 4,1 %, c’est une hausse «suffisante» et on n’entrevoit pas de risque pour la paix syndicale au Québec.
Le numéro 1 du Conseil du patronat du Québec souhaite que les employés prennent en considération les aménagements faits à l’organisation du travail. Il cite la flexibilité dans les horaires, le télétravail, ou encore l’offre de bonis de performance comme de nombreuses améliorations apportées au sort des travailleurs.
«Les employeurs ont fait beaucoup d’efforts. Il ne faut pas associer les relations de travail au simple fait du salaire», ajoute-t-il. M. Blackburn soutient également que les hausses de salaire des 12 dernières années ont été favorables aux employés.
Le nombre de conflits de travail explose
Après les trois premiers mois de l’année :
- 47 conflits
- 45 grèves
- 2 lock-out
Quatre fois plus par rapport à la moyenne des trois dernières années sur une période comparable
Source : Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale