Pourquoi passer à l’action en risquant la prison ?
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Les actions de désobéissance civile se multiplient au Québec et sur la planète.
À Rouyn-Noranda, des citoyens ont bloqué un train menant à la Fonderie Horne pour empêcher l’arrivée d’arsenic et autres poisons qui aboutissent dans l’air respiré par leurs enfants.
À Montréal, le Collectif Antigone a occupé le terminal Valero de l’oléoduc 9 B, exigeant la diminution immédiate des quantités de pétrole qui y circule, puis sa fermeture. En mauvais état, il est jugé dangereux par des experts. L’action vise à protéger l’eau et le climat.
À Londres, deux jeunes militantes ont lancé de la soupe aux tomates sur la vitre recouvrant les Tournesols de Van Gogh. Se collant au mur à côté du chef-d’œuvre, l’une d’elles a scandé : « Qu’est-ce qui vaut le plus, l’art ou la vie ? (...) Êtes-vous plus préoccupés par la protection d’une peinture ou de la planète et des humains ? »
L’énumération pourrait continuer.
Devoir moral
Si ces personnes prennent le risque d’avoir un casier judiciaire et d’être ostracisées, c’est pour attirer l’attention et surtout susciter l’action.
Malheureusement, pour avoir l’effet escompté, leurs gestes doivent être dérangeants. Autrement, les médias n’en parlent pas. Ou à peine, comme dans le cas de Valéro.
Ces personnes sont prêtes à aller en prison pour que les pouvoirs publics et les entreprises polluantes prennent leurs responsabilités. Parmi elles, il y a beaucoup de jeunes dont l’avenir est lourdement hypothéqué par l’inaction climatique.
Plusieurs évoquent « l’état de nécessité », rappelant que la crise climatique et la perte de biodiversité mettent l’humanité en péril. Agir pacifiquement est alors une forme de légitime défense.
Même de grands scientifiques en sont rendus là.
Scientist Rebellion
Plus de 500 universitaires de 42 pays font partie du mouvement Scientist Rebellion qui pratique la désobéissance civile.
Sur leur site, on peut lire : « En tant que scientifiques, nous avons écrit des rapports et fait des présentations sur la crise climatique et écologique à ceux qui sont au pouvoir. Nous devons maintenant avoir l’humilité d’accepter que ces tentatives n’ont pas fonctionné. »
Ils passent donc à l’action autrement, risquant la prison.
Parmi eux, il y a Peter Kalmus, climatologue de la NASA. Chiffres à l’appui, il démontre que nous nous dirigeons directement vers l’effondrement de la civilisation. Comme tant d’autres scientifiques, il implore toute la société de se mobiliser.
Besoin d’ambition
Plus on est informés, et plus on est alarmés. C’est bien pour cela que tant de gens préfèrent ignorer certaines nouvelles.
C’est aussi plus confortable de faire reposer la responsabilité sur la Chine et l’Inde. Pourtant, le Québec a tout ce qu’il faut pour devenir une source d’inspiration pour la transition sociale et écologique. Nous en tirerions même profit !
L’histoire nous apprend que la désobéissance civile est un important moteur de changement. Elle a notamment contribué à ce que les femmes acquièrent des droits, dont celui de voter. Aujourd’hui encore en Iran, elles y ont recours pour défier des règles injustes.
Lorsqu’un État abdique sa responsabilité de protéger sa population contre un danger imminent, il rompt le contrat social qui lui donne sa légitimité.
Face à l’urgence environnementale, la désobéissance civile intelligente me semble plus que légitime pour qu’on passe enfin à l’action.