Un soldat d’Hitler meurt en Estrie
L’homme de 97 ans a péri hier dans l’incendie qui a ravagé son appartement, où il avait refait sa vie
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Un ancien soldat d’Hitler lors de la Seconde Guerre mondiale qui avait refait sa vie en Estrie après sa brillante carrière de professeur universitaire a péri dans un violent incendie, hier.
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Au petit matin, les flammes ont ravagé un bâtiment agricole avec un appartement, sur le chemin de l’Aéroport, dans le Canton de Potton. Des pompiers d’Austin et même de North Troy, au Vermont, sont venus donner un coup de main à ceux de cette municipalité, qui borde la frontière américaine.
Une fois l’incendie maîtrisé, un corps a été retrouvé dans les décombres. Selon nos informations, il s’agit d’Adalbert Lallier, âgé de 97 ans.
Le 24 heures avait rencontré celui qui cachait un terrible secret dans son appartement rustique en campagne dans le cadre d’un documentaire.
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Pour survivre
L’homme d’origine hongroise avait été recruté de force alors qu’il n’avait que 17 ans dans la Waffen-SS, une unité militaire d’élite de l’Allemagne nazie.
« Je n’avais aucune volonté de devenir officier de la SS, je n’avais aucune volonté de servir des Allemands, mais je voulais survivre », avait confié avec fermeté le nonagénaire.
Il fréquentait l’école secondaire quand il a été enrôlé comme opérateur radio, en 1942.
Durant la Seconde Guerre mondiale, M. Lallier a été témoin d’atrocités, comme la fois où il a vu le sous-lieutenant Julius Viel abattre sept Juifs qui creusaient une tranchée aux abords du camp de concentration de Theresienstadt, en Tchécoslovaquie. Paralysé par la peur, il a assisté impuissant à ces exécutions.
Sur la route du Canada
Il s’est ensuite retrouvé prisonnier de guerre des Britanniques en Autriche, où le polyglotte a aidé à reloger des réfugiés juifs au Canada. Grâce à son implication, le Hongrois s’est à son tour fait proposer d’y immigrer.
« Un Québécois m’a offert ma première pomme [...]. C’était la meilleure pomme de ma vie parce que je me considérais arrivé dans le pays de mes rêves », s’est-il souvenu, assis sur une chaise devant un mur de bois.
Fraîchement débarqué à Montréal, M. Lallier a entrepris des études supérieures en économie avant de décrocher un poste de professeur dans son domaine au Collège Loyola, puis à l’Université Concordia.
Son supérieur condamné
Il a aussi été appelé à la barre des témoins lors du procès de Julius Viel. Son ancien supérieur a été condamné à 12 ans de prison pour les meurtres.
Ses aveux devant une cour de justice ont toutefois eu l’effet d’une bombe, et ont abruptement mis fin à sa carrière d’enseignant. L’Université Concordia n’a pas renouvelé son contrat en 1998.
Reclus sur une ferme dans les Cantons-de-l’Est, l’amateur d’échecs a notamment écrit quatre livres sur l’Holocauste.
La Sûreté du Québec enquête sur l’incendie mortel survenu dans ce petit village de quelque 2000 âmes.
– Avec les informations de Jules Falardeau