Montréal tout-terrain: ses vitrines à la portée des casseurs
Notre chroniqueur a visité une galerie d’art contemporain chambardée par le déploiement de la COP15
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À l’intérieur de Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.
Le marchand d’art Michael Mensi peut se « vanter » de se trouver à l’un des pires endroits pour un commerçant dans le contexte de la COP15 : sa galerie aux 102 vitres de la rue Viger jouxte la clôture de sécurité, et il craint que des émeutiers les fracassent.
« Il y a eu la pandémie pendant deux ans et maintenant la COP15 annule mon temps des Fêtes qui est une période cruciale pour mes affaires », dit, exaspéré, M. Mensi.
Le commerçant a invité Le Journal à visiter sa galerie, la Galerie MX, qui a pignon sur rue à cet endroit depuis 18 ans.
Du deuxième étage, on a une vue imprenable sur la clôture de sécurité et sur le déploiement policier de l’autre côté.
Une douzaine d’agents inspectaient le périmètre.
« On est vraiment dans leur face, comme tu peux voir, mais du mauvais bord du mur, du bord non protégé ! »
Lors de mon arrivée, une représentante du propriétaire de l’immeuble parlait avec M. Mensi.
Elle a confirmé que son loyer de décembre était attendu comme d’habitude.
« Ça me coûte 16 000 $ par mois de loyer et j’ai des employés à payer. »
Des snipers perchés
« Je vis plus haut dans la tour de ma galerie et, il y a une dizaine de jours, j’ai vu des snipers (NDLR : tireurs d’élite) installer leurs carabines à trépied et prendre position sur le toit du Palais [des congrès], sans doute pour évaluer comment se positionner au besoin. »
« En voyant ces tireurs professionnels, j’ai compris que ça risque de ne pas être de la rigolade, cette conférence : ils se préparent à tous les scénarios. »
J’ai compté les carreaux vitrés de la Galerie MX qui donnent sur la rue. Il y en a 102.
« Je suis en train d’appeler mes assurances pour savoir ce qui arrive si des émeutiers fracassent des vitrines et saccagent des œuvres d’art... et ce n’est pas clair. »
« J’ai évalué que placarder mes 102 vitres coûterait de 12 000 $ à 15 000 $. »
C’est une gageure d’investir pour se protéger ; rien ne garantit qu’il y aura de la casse.
M. Mensi a écrit à son conseiller municipal et au directeur des opérations de la COP15.
Impacts sur les voisins du Palais
« Nous sommes en train d’étudier la possibilité de mettre en œuvre un programme afin d’atténuer les impacts financiers négatifs sur les commerces avoisinant le Palais des congrès. Dès que j’aurai plus de détails, je vous en ferai part » lui a répondu Iwan Chan, du Bureau de gestion de la COP15.
M. Mensi sourit ironiquement en me faisant lire cette réponse.
« Ils n’ont pas pensé une seconde aux conséquences sur le voisinage et, quand ce sera fini, on nous dira de nous arranger avec nos problèmes. »