Bilinguisme : les promesses trahies de 1867
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En 1867, la Confédération est acceptée chez nous pour deux raisons. Elle représente d’abord un gain d’autonomie puisque la création de la province de Québec est perçue comme une résurrection du Bas-Canada.
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Le nouveau régime est également vu comme un pacte entre deux peuples. Voilà pourquoi l’article 133 de la Constitution donne une certaine reconnaissance au français et à l’anglais. Des droits constitutionnels sont aussi donnés alors aux anglo-protestants du Québec, tout comme aux franco-catholiques de l’Ontario et, en 1871, à ceux du Manitoba. De leur côté, les Acadiens ont des écoles séparées au Nouveau-Brunswick.
Xénophobie anti-française
Ces garanties vont toutefois voler rapidement en éclats. Dans l’Ouest, on ferme les écoles françaises et on pend Louis Riel. Au Nouveau-Brunswick, non contents de les avoir déportés en 1755, les Anglais prennent à nouveau les Acadiens pour cible.
En 1871, la province ferme les écoles catholiques.
L’affaire atteint son paroxysme avec les émeutes de Caraquet en 1875, qui opposent des Acadiens à l’armée et qui feront deux morts.
Parallèlement, les Canadiens anglais du Québec dominent l’économie et imposent leur langue au travail et dans l’affichage. Bien sûr, ils ne parlent pas français. Même à Québec, par exemple, il est impossible de se faire servir en français au bureau de poste.
Les Canadiens français du Québec ont tiré deux conclusions de ces épisodes. La première est que le reste du Canada leur était profondément hostile, situation qui sera confirmée à nouveau par la fermeture des écoles françaises ontariennes en 1912.
Deuxièmement, le Québec était le seul territoire où leur nation pouvait vivre selon ses coutumes et sa langue, même si la situation y était précaire.
Avec la Révolution tranquille, cet état de choses amène le Québec à vouloir plus de pouvoirs, pour assurer la survie de la nation canadienne-française. Devant les refus répétés du Canada anglais, le mouvement indépendantiste renaît.
Double traquenard
Ottawa va répliquer en 1969 avec « un piège », comme l’explique très bien l’auteur Éric Poirier dans un excellent et récent livre intitulé Le piège des langues officielles, publié chez Septentrion. Avec sa législation sur le bilinguisme, Pierre Trudeau visait officiellement à permettre que les francophones puissent vivre partout en français au pays et que les anglophones puissent continuer à vivre en anglais au Québec. La charte de 1982 poursuivait le même objectif.
Le traquenard était double. D’abord, toutes les provinces étaient égales, car le bilinguisme s’appliquait en théorie partout. L’existence du Québec comme peuple était ainsi niée de même que ses velléités autonomistes.
Par ailleurs, les anglophones du Québec étaient mis juridiquement sur le même pied que les francophones hors Québec.
Chaque gain pour ces derniers devenait un gain potentiel pour la communauté anglophone chez nous, ce à quoi le gouvernement québécois devait s’opposer.
Trudeau a sciemment divisé les francophones pour les affaiblir. Évidemment, cette approche cynique n’a aucunement freiné l’injustice que constitue l’assimilation des francophones dans leur propre pays.
Alors que Justin Trudeau s’apprête à modifier la loi sur les langues officielles, l’histoire nous enseigne deux choses. Le Canada anglais ne renoncera jamais à éradiquer notre culture et Ottawa continuera de prétendre qu’il défend le français, de la pure hypocrisie.