/lifestyle/books
Navigation

Romans d’ici: au paradis des amours interdits!

La renaissance de L’Interlope
Photo fournie par Éditions Sémaphore

Coup d'oeil sur cet article

Que voilà un roman moqueur ! Il tourne en dérision les interdits d’hier et ceux d’aujourd’hui pour mieux faire souffler un grand vent de liberté. 

Le coin Saint-Laurent et Sainte-Catherine est indissociable des nuits chaudes de Montréal. François Bellemare y plante donc un immeuble à la vocation bien particulière, propriété d’une famille qui l’est également. Chez les Foulanault, on a une idée fixe et payante : défier toute entrave aux plaisirs charnels.

Il faut dire qu’Octave, l’ancêtre, avait le sens des affaires. À la fin du 19e siècle, ce commerçant prospère voyait bien autour de lui que sous l’affrontement entre patriotes et loyalistes, des rapprochements se tissaient. Comment empêcher les cœurs d’aimer ? Autant dès lors, leur faciliter la tâche.

Ce fut là la première mission de l’édifice qu’Octave fit ériger dans ce qui était alors le Faubourg Saint-Laurent. L’enseigne qui le surplombait ne disait pourtant pas grand-chose de sa vocation : « L’Inter-mède, l’Op-éra théâtral » – rapidement ramené à « L’Interlope ».

Officiellement, ses nombreuses salles permettaient de tenir des cours de dessin ou des réunions pour clubs sportifs. Dans les faits, elles abritaient « les amours hors-norme entre célibataires des deux solitudes linguistiques de la Confédération ». 

À chacun sa porte d’entrée et ses escaliers, jusqu’aux alcôves permettant les retrouvailles !

Nouvelle clientèle

C’est dire que lorsque les couples bilingues devinrent socialement acceptés, Octave crut la mort de son commerce arrivée.

C’était sans compter sur Éloïse, sa plus jeune. Elle avait bien vu la nouvelle clientèle à conquérir : celle des jeunes filles non seulement en quête du droit de vote, mais du droit de résister au mariage sans pour autant se priver de plaisirs affriolants. L’émancipation des unes consolida la fortune de l’autre ! L’Interlope ne mourait pas !

D’où le titre du roman, La renaissance de L’Interlope. Elle surviendra tout au long du siècle, avec chaque fois à sa tête un descendant Foulanault. 

Après les femmes libérées, il fallut accueillir les interdits des liaisons interraciales, puis homosexuelles, puis non genrées. 

L’Interlope était le refuge pour tout ce que la société n’arrivait pas à tolérer.

Alors quand, en 2029, Fatoumata Foulanault se retrouve à la tête de l’édifice familial, elle est bien embêtée : tout est maintenant accepté ! Signera-t-elle le naufrage de toute une épopée ?

Non, car il reste un espoir, celui de la nouvelle Charte... de la prohibition de la séduction en milieu de travail. Le marché des amours frustrés a toujours de l’avenir ! 

Bellemare, dont c’est le premier roman, nous raconte cette saga avec un entrain redoutable, fait de jeux de mots, d’ironie mordante et d’observations amusées. Surtout, il s’appuie sur la véritable histoire de la répression sociale et politique qui a marqué Montréal au fil du temps. 

Ce faisant, on est loin de coups de griffe provocateurs à la nouvelle morale ambiante. 

Bellemare démontre plutôt que là où le contrôle sévit sans nuances, aveugle aux envies des corps et des cœurs, des voies de contournement se forment.

La leçon porte... et rapporte !

Commentaires

Vous devez être connecté pour commenter. Se connecter

Bienvenue dans la section commentaires! Notre objectif est de créer un espace pour un discours réfléchi et productif. En publiant un commentaire, vous acceptez de vous conformer aux Conditions d'utilisation.