Gaz Bar Blues: place à la mélancolie
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La pièce Gaz Bar Blues reprend habilement la tendresse d’un père sur le déclin et la fin d’une époque qui avaient fait le succès du film éponyme de Louis Bélanger il y a une vingtaine d’années.
Adaptée pour la première fois au théâtre par David Laurin, sous la direction d’Édith Patenaude, cette œuvre présentée chez Duceppe reste fidèle à l’originale qui se déroule en 1989 dans Limoilou, alors un quartier dur de Québec. Martin Drainville trouve le ton juste pour incarner le patriarche diminué qui sent la mort de sa station-service approcher, mais qui conserve néanmoins son autorité et son amour pour ses enfants qui l’aident à tenir le coup.
Contrairement au film, le plus jeune personnage est féminin, une excellente idée. Miryam Amrouche personnifie à merveille le benjamin de la famille dans cet univers d’hommes. Ses deux grands frères (Frédéric Lemay et Steven Lee Potvin) veulent tous deux s’affranchir de ce commerce sous respirateur artificiel, mais ils se querellent souvent.
Cette famille est entourée par des voisins qui passent leur temps à socialiser dans cet établissement. Ces joyeux lurons sont incarnés par des comédiens qui constituent aussi le cœur du groupe de blues qui jouent sur scène. Ils s’acquittent de leur mission avec aplomb. Soulignons l’apport de Francis La Haye, hilarant dans le rôle de l’inspecteur de la pétrolière, de Claude Despins dans la peau d’un mononcle typique et de Bertrand Alain, qui prend les traits du vieux garçon affable qui n’est jamais sorti de son quartier. Très présents, ces personnages badinent constamment, offrant un humour gras, mais plutôt vieillot.
Musique omniprésente
Il est devenu assez fréquent que des musiciens participent à des productions théâtrales montréalaises, mais rarement les voit-on prendre autant de place. Du blues vient entrecouper chacun des nombreux tableaux de la pièce, en plus d’occuper certains pans entiers. Un si fort apport musical constitue indéniablement la signature de ce spectacle. Le commencement tendu de cette pièce est d’ailleurs brillamment rendu grâce à un des morceaux de Mathieu Désy. Mais toute cette orchestration étire la soirée sur deux heures et ralentit le rythme.
En campant un lieu et une époque bien définis, mais révolus, cette œuvre offre une mélancolie touchante, qui plaira particulièrement à ceux qui aiment aussi un humour sans prétention.
Gaz Bar Blues ★★★1/2
Une adaptation de David Laurin
Avec Martin Drainville, Miryam Amrouche, Frédéric Lemay et Steve Lee Potvin