Choc Trudeau-Poilievre à l’horizon
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Aurons-nous droit au premier vrai choc Trudeau-Poilievre dès le retour en Chambre la semaine prochaine ?
Je pose la question parce que Pierre Poilievre s’est transformé en courant d’air après sa fracassante victoire à la direction du Parti conservateur en septembre dernier.
Il a donné peu d’entrevues, a, pour l’essentiel, ignoré la presse nationale d’Ottawa. (Le Journal a eu droit à un des rares entretiens qu’il a donnés dans les semaines suivant sa victoire.)
Son message et ses répliques au premier ministre passaient essentiellement par ses réseaux sociaux, sa chapelle de fervents fidèles.
Une chapelle trop étroite pour qu’un grand nombre de Canadiens s’y sentent à l’aise.
Cette stratégie d’évitement s’est soldée par une cinglante défaite dans une élection partielle dans le grand Toronto à la fin de l’année.
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Changement de cap
Pierre Poilievre a changé de cap. Son récent passage de trois jours au Québec a été ponctué d’une foule de rencontres avec les médias nationaux et régionaux.
Il s’est souvent rendu disponible aussi à l’extérieur du Québec et a même joué le jeu des impromptus de presse au Parlement.
Stephen Harper se prêtait à l’exercice à l’époque où il était dans l’opposition. C’est quand il a pris le pouvoir qu’il s’est refermé comme une huître.
Maintenant, Pierre Poilievre promet de continuer sur cette tendance au retour des travaux parlementaires cette semaine.
Il sera très intéressant de suivre ses interactions avec les médias – surtout la presse parlementaire –, pour lesquels il conserve un profond dédain.
S’il veut être écouté, il devra avoir quelque chose à dire, ce qui n’est pas toujours facile pour un chef de l’opposition, un des rôles les plus ingrats en politique.
Difficile de ne pas ressembler à un gérant d’estrade, de proposer des solutions – quand on en a – sans trop dévoiler son jeu avant un éventuel scrutin.
Incarner l’espoir
Pierre Poilievre aura devant lui un Justin Trudeau à la fois revigoré mais affaibli.
Revigoré, parce qu’il semble être déterminé à mener son parti dans les prochaines élections en se positionnant en sauveur des valeurs canadiennes d’optimisme et d’ouverture face au populisme inspiré par la droite américaine.
Le contraste peut sembler évident aux yeux de libéraux convaincus, mais à ce point-ci dans le cycle électoral, après presque 8 ans de pouvoir libéral, les Canadiens risquent de considérer plus attentivement d’autres options.
Affaibli, parce que le Parti libéral n’est pas perçu comme le plus apte à faire face aux problèmes que l’électorat considère comme les plus aigus, nommément l’inflation et l’économie.
Selon un sondage Abacus, les libéraux dominent sur un sujet du point de vue de la crédibilité, soit la guerre en Ukraine.
Cela étant dit, même si les conservateurs devancent systématiquement les libéraux par une poignée de points de pourcentage dans les intentions de vote, Justin Trudeau demeure le premier ministre préféré (54 %) des Canadiens dans un duel contre Poilievre (46 %).
Reste que Poilievre demeure son pire ennemi. Son naturel a tendance à revenir au galop sous la forme de tweets enragés, d’appui étrange à ceux qui aiment les gros camions polluants et les ustensiles en plastique.
Curieuse façon d’incarner l’espoir, comme il prétend le faire.
Beaucoup de Canadiens ont une mauvaise opinion de lui, mais ils sont aussi nombreux à ne pas s’être encore fait une tête. À quelle version de Poilievre auront-ils droit en 2023 ?