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Un ado soupçonné à tort d'avoir caché une clé dans son anus victime d'une fouille «dégradante»

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Les parents d’un adolescent songent à poursuivre un centre de réadaptation de la DPJ après la fouille de leur fils qui était soupçonné à tort d’avoir caché une clé dans son anus.

Déjà poursuivi pour négligence à la suite du triste décès de la «fillette de Granby» en 2019, le Centre intégré universitaire de santé et des services sociaux (CIUSSS) de l’Estrie – CHUS pourrait faire face à la justice encore une fois.

Photo courtoisie

Selon ce que notre Bureau d’enquête a appris, il y a eu un branle-bas de combat en avril dernier au centre jeunesse Val-du-Lac de Sherbrooke alors que la direction cherchait à récupérer une clé maîtresse de l’établissement qui avait été volée. 

  • Écoutez le segment judiciaire avec Nicole Gibeault diffusé chaque jour en direct 11 h 10 via QUB radio :

Des agents d’intervention ont alors forcé un adolescent de 16 ans à se soumettre à une série de mesures choquantes pour déterminer s’il ne l’avait pas dissimulée dans sa cavité anale.

Photo courtoisie, Léandre Roy

«Il a dû se mettre à nu [...], enfiler une robe de chambre [...], dû retourner devant les agents qui l’ont fait s’accroupir [squatter], sauter et tousser, afin de voir s’il ne cachait pas les clés [...] dans sa cavité anale», peut-on y lire dans la plainte que le père a fait parvenir à la commissaire adjointe aux plaintes du CIUSSS, Chantal Lessard.

Illégal et dégradant

Mandatée par la famille, Me Valérie Assouline est outrée par la situation. Elle étudie actuellement toutes les options et une poursuite en dommages et intérêts est envisagée.

Spécialisé en droit de la jeunesse, Me Tiago Múrias a indiqué n’avoir jamais vu ça dans ses 10 années de pratique: «C’est un abus grave, une fouille illégale et dégradante.»

Me Tiago Múrias.
Avocat
Photo Chantal Poirier
Me Tiago Múrias. Avocat

À cet égard, l’adolescent, dont nous ne pouvons révéler l’identité à cause de son âge, nous a confié s’être senti «humilié et un moins que rien».

Ce qui n’est pas une surprise pour la juge à la retraite, Nicole Gibeault: «Ils ont pris des moyens exagérés qui portent atteinte à la dignité humaine», estime-t-elle.

«S’ils croyaient vraiment qu’un jeune avait une clé dans sa paroi anale, c’est à l’hôpital qu’ils auraient dû l’amener», ajoute-t-elle.

Pas d’urgence

Plusieurs autres personnes que nous avons consultées remettent en question la méthode employée.

«Il n’y avait aucune urgence. Ils auraient pu simplement utiliser un détecteur de métal», nous a entre autres indiqué une personne qui enquête sur des dossiers impliquant des centres d’hébergement et qui n’est pas autorisée à parler aux médias.

Ou même faire une radiographie, nous ont précisé quelques médecins. 

Choquant, mais légitime, dit le CIUSSS 

Même si la fouille peut être jugée choquante, les intervenants étaient justifiés de la faire selon la commissaire aux plaintes du CIUSSS de l’Estrie.

La fouille a été faite «pour s’assurer que la clé ne soit pas camouflée dans l’anus du jeune. [...] L’équipe était légitimée de faire une fouille [...]», indique la commissaire adjointe aux plaintes, Chantal Lessard, dans sa décision écrite dont nous avons pris connaissance.

Et elle ajoute: «Je suis consciente que l’image d’une telle scène peut choquer, mais je comprends que l’établissement avait des motifs raisonnables de croire que la sécurité des autres jeunes pouvait être compromise [...]».

Douche froide

Cette décision a été reçue comme une douche froide par la famille du jeune homme qui s’attendait plutôt à des excuses.

Dans sa plainte, le père reproche notamment au centre d’avoir effectué une fouille à nu alors que les directives internes l’interdisent. Elles permettent plutôt la fouille sommaire par palpation et la fouille complète (voir encadré).

Le père reproche aussi au centre de ne pas l’avoir contacté avant d’effectuer la fouille: «Ce n’est que quelques heures après qu’une intervenante nous l’a appris», affirme-t-il.

Par le biais de sa porte-parole Annie-Andrée Émond, le CIUSSS a refusé de commenter le cas précis. 

Elle indique cependant que le CIUSSS s’assure que les équipes ont bien suivi les procédures. 

Selon la Norme de pratique sur les fouilles CIUSSS de l’Estrie – CHUS

  • La fouille sommaire et la fouille complète sont autorisées ;
  • Seuls les policiers sont autorisés à effectuer une fouille à nu ;
  • S’assurer que les parents sont informés de l’application d’une mesure de fouille ;
  • Dernière révision de ces normes : 9 janvier 2012
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