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Projet-pilote: les aspirantes-infirmières en renfort dans les salles d'accouchement

Accouchement infirmières
Photo Adobe Stock Depuis le 11 janvier et jusqu’au 31 décembre 2023, des candidates à la profession d’infirmière peuvent œuvrer auprès des femmes qui accouchent et de leur nouveau-né à Sainte-Justine et à l’Hôpital général juif.

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En raison de la pénurie de main d’œuvre, le gouvernement Legault autorise les candidates à la profession d’infirmière (CEPI) à travailler en salle d’accouchement dans le cadre d’un projet-pilote. Cette pratique avait pourtant été interdite en 2016, à la suite d’un drame.

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Depuis le 11 janvier, des CEPI peuvent œuvrer auprès des femmes qui accouchent et leur nouveau-né à Sainte-Justine et à l’Hôpital général juif. Québec a donné le feu vert à un «projet expérimental» sensé durer un an.  

Il s’agit d’étudiantes en soins infirmiers ayant obtenu leur diplôme universitaire, mais qui n’ont pas encore réussi l’examen professionnel de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ) ni obtenu leur permis d’exercice.

La raison qui a poussé l’État à emprunter cette voie est claire : «La rareté de la main d’œuvre en salle d’accouchement a des conséquences importantes sur la capacité du réseau de la santé et des services sociaux d’offrir des services de proximité en obstétrique», est-il écrit noir sur blanc dans le décret gouvernemental.  

Une décision qui inquiète la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ). «Il faut comprendre que les unités mère-enfant, un peu comme les soins intensifs et l’urgence, ce sont des unités de soins critiques, donc où il y a un potentiel de complication assez rapide. D’introduire des nouvelles infirmières à l’entrée de la profession, qui n’ont même pas terminé leur processus, ce sont des candidates à l’exercice, elles n’ont pas un permis plein pouvoir d’exercice, dans ce type d’unité-là, c’est extrêmement préoccupant», fait valoir le vice-président, Jérôme Rousseau.  

Rapport du coroner

Cette pratique était d’ailleurs proscrite depuis plus de six ans. Un «évènement» investigué par le coroner ayant provoqué le décès d’une femme qui enfantait avait incité l’OIIQ à interdire les activités professionnelles des CEPI en salle d’accouchement.  

Généralement, les infirmières qui débutent leur carrière consolident leur apprentissage dans des unités de soins moins critiques, plaide M. Rousseau. Il rappelle que le taux de réussite des CEPI l’automne dernier à l’examen de l’Ordre, un passage obligé pour obtenir le permis d’exercice comme infirmière, a été dramatiquement bas (51%).  

«C’est la confirmation qu’on est en train d’utiliser des jeunes infirmières en processus d’apprentissage pour combler des manques criants de personnel, alors qu’on ne s’attaque pas aux besoins. Encore une fois, on y va à la pièce : un trou, une cheville, un trou, une cheville, plutôt que de regarder c’est quoi les problèmes dans le réseau de la santé pour être capable de trouver des solutions à l’attraction et la rétention des infirmières», insiste le vp de la FIQ.  

Sans parler de l’énorme pression mise sur le dos de ses aspirantes-infirmières. «C’est tellement des situations à risque, personne ne veut vivre des complications, ajoute-t-il. Je ne veux pas parler de malheurs, mais si un bébé complique et tout ça, et qu’il y aurait un décès, c’est extrêmement difficile à supporter pour une équipe de travail au complet, autant pour les infirmières médecins, et quand on est à quelques mois dans le début d’une profession, ça peut marquer littéralement, si on n’a pas eu l’accompagnement (nécessaire)».  

Allègement règlementaire souhaité

Jérôme Rousseau ne serait d’ailleurs pas surpris que le gouvernement Legault ne se contente pas d’un projet-pilote et veille étendre cette pratique à tout le Québec éventuellement.  

Dans leur mémoire déposé en juin dernier au Conseil des ministres, Christian Dubé et Lionel Carmant soulignent effectivement avoir demandé en vain à l’OIIQ d’alléger le cadre règlementaire applicable aux CEPI afin de leur permettre de pratiquer en salle d’accouchement pour contrer le manque de personnel.  

Le président de l’Ordre, Luc Mathieu, avait alors indiqué au gouvernement « [qu’] aucune nouvelle donnée ne [lui] permet de conclure que les préoccupations légitimes ayant mené à l’exclusion de l’exercice des CEPI auprès de parturientes ne sont plus fondées. Parconséquent, [il] estim[e] qu’il est prématuré pour l’OIIQ d’initier dès maintenant une démarche de modification réglementaire ».  

Joint par notre Bureau parlementaire, le porte-parole de l’organisation a précisé que l’Ordre avait donné son aval à la tenue temporaire d’un projet expérimental sous réserve de conditions particulières et d’une évaluation par une équipe de chercheurs des impacts de la réintégration de ces CEPI auprès des femmes qui accouchent.   

-Avec la collaboration de Marie-Christine Trottier

Extraits du décret gouvernemental sur le projet-pilote permettant à des candidates à la profession d’infirmière (CEPI) de travailler en salle d’accouchement jusqu’au 31 décembre 2023 à Sainte-Justine et à l’Hôpital général juif.

Une parturiente (femme accouchant) à qui un établissement participant au projet propose de recevoir des services d’une CEPI est libre de refuser cette proposition

Une CEPI peut prendre en charge, sous supervision, un maximum d’une parturiente à la fois dans la salle d’accouchement

Une CEPI n’exerce pas auprès :

  • d’une parturiente présentant une grossesse à risque élevé instable
  • d’une parturiente sous monitorage hémodynamique
  • d’un nouveau-né dont une réanimation néonatale à la naissance est anticipée
  • d’une parturiente présentant une complication durant l’accouchement

Une infirmière-ressource est présente dans l’unité en tout temps et supervise les activités de la CEPI. Cette infirmière doit :

  • Être présente lors de l’accouchement
  • Superviser la CEPI lors d’un tracé fœtal atypique ou anormal
  • Réviser les prescriptions médicales du dossier de l’usager en début de quart de travail

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