Le professeur Patrick Provost suspendu une 2e fois par l’Université Laval
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Le professeur Patrick Provost vient d’être suspendu pour une deuxième fois par l’Université Laval pour des propos controversés sur les vaccins anti-COVID, une décision qui survient alors que Québec a récemment rappelé à l’ordre les dirigeants universitaires concernant la «censure» qui entrave la liberté académique.
M. Provost, qui est professeur au département de microbiologie-infectiologie et d’immunologie de l’Université Laval, a été suspendu sans salaire pendant quatre mois, soit deux fois plus longtemps que lors de la première suspension imposée en juin pour des raisons similaires.
Cette fois-ci, ce sont des propos tenus sur les ondes de CHOI 98,1 FM qui sont à l’origine de la sanction. Ce spécialiste de l’ARN y a réitéré son opposition à la vaccination des enfants contre la COVID, remettant en question son efficacité et ses bénéfices, ce qui va à l’encontre du consensus scientifique sur la question.
Quelques jours plus tard, un auditeur a déposé une plainte via le site web de l’Université Laval, ce qui a mené au déclenchement d’un nouveau processus disciplinaire.
Le 23 janvier, le professeur a été informé de sa suspension sans salaire de quatre mois qui a débuté le jour même. La direction lui précise que toute récidive pourrait mener à un congédiement, rapporte M. Provost.
Cette décision est à nouveau contestée par le Syndicat des professeurs et professeures de l’Université Laval, qui a déposé mercredi un grief pour s’y opposer. Il n’a toutefois pas été possible de joindre un de ses porte-paroles au moment d’écrire ses lignes.
L’Université Laval reproche à Patrick Provost d’avoir enfreint des principes énoncés dans sa Politique sur la conduite responsable en recherche, rapporte le principal intéressé, qui conteste cette interprétation considérée comme étant beaucoup trop large.
«Ils interprètent mon intervention à la radio comme faisant partie d’une activité de recherche ou de mes fonctions professorales. Mais je n’ai pas présenté mes résultats de recherche, j’ai exercé mon esprit critique sur certains aspects de la société en lien avec la science que je suis capable de maîtriser. C’est ma liberté universitaire qui est en jeu», affirme M. Provost.
De son côté, la direction de l’Université Laval indique qu’elle ne peut commenter directement la situation, puisque le dossier personnel d’un employé est confidentiel.
Sa porte-parole, Andrée-Anne Stewart, assure que «toutes les personnes à l’Université Laval peuvent faire de la recherche qui met en cause la vaccination, s’exprimer publiquement sur la vaccination et émettre des opinions sur le sujet».
- Écoutez son entrevue au micro de Richard Martineau via QUB radio :
Loi sur la liberté académique
Cette décision survient alors que la Loi sur la liberté académique en milieu universitaire a été adoptée en juin dernier.
La législation stipule qu’un professeur a le droit «d’exprimer son opinion sur la société et sur une institution, y compris l’établissement duquel la personne relève, ainsi que sur toute doctrine, tout dogme ou toute opinion».
De son côté, l’Université Laval précise que ce droit «doit s’exercer en conformité avec les normes d’éthique et de rigueur scientifique généralement reconnues par le milieu universitaire et en tenant compte des droits des autres membres de la communauté universitaire».
Au début janvier, la nouvelle ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, a par ailleurs fait parvenir une «mise au point» aux dirigeants universitaires, inquiète de possible «dérapage» concernant le respect de la liberté académique. Dans cette missive, elle rappelle notamment que la «censure» n’a pas sa place dans les universités.
Première suspension dénoncée
La première suspension de M. Provost, en juin dernier, avait aussi été contestée par le Syndicat des professeurs et professeures de l’Université Laval, par le biais d’un grief.
Cette décision avait par ailleurs été vivement dénoncée par la Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université (FQPPU), qui avait invité l’Université Laval à «rectifier le tir» à ce sujet.
La première sanction infligée à ce professeur ne respecte pas la Loi sur la liberté académique dans le milieu universitaire, avait conclu la FQPPU après analyse du dossier.