Froid extrême: deux amies viennent en aide à des sans-abri frigorifiés à Montréal
Elles interpellent les élus et surtout la mairesse Valérie Plante à aller sur le terrain
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Vendredi, lors de la vague de froid extrême à Montréal, deux amies ont uni leurs forces pour offrir des manteaux et des repas à des itinérants en grande détresse et aux mains complètement gelées.
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«Quand on a vu les températures qui allaient chuter en dessous de -40 degrés Celsius, c’était spontané. Qu’est-ce qu’on peut faire?», résume Ariane Goyette, qui interpelle les élus et demande à la mairesse Valérie Plante de s’attaquer davantage au fléau de l’itinérance.
Après avoir vu les prévisions météo quelques jours avant la vague de froid extrême qui a déferlé sur le Québec, elle a écrit à son amie Noémie Charest qui a l'habitude d'offrir chaque semaine des repas chauds aux sans-abri.
- Écoutez l'entrevue avec Ariane Goyettte et Noémie Charest à l’émission de Philippe-Vincent Foisy via QUB radio :
Les deux amies ont lancé un appel dans les réseaux sociaux, ce qui a aussitôt généré un élan de générosité, explique Mme Goyette. Elles ont rapidement récolté 50 manteaux neufs ou d'occasion, de nombreuses paires de gants et de chaussettes, ainsi que des spaghettis et des dizaines de soupes chaudes.
«Ça a créé une vague incroyable», raconte Mme Goyette. «Je pense que les gens aiment s’impliquer et donner. J’ai été surprise.»
«On aurait dit des mains mortes»
Vendredi après-midi, Ariane et Noémie sont arrivées avec quatre autres amis à bord de trois caravanes remplies de nourriture et de vêtements vers la Mission Old Brewery dans l’arrondissement Ville-Marie.
Le groupe a alors croisé un premier homme sans-abri.
«Le gars était en t-shirt, manteau de cuir grand ouvert, sans gants», raconte Mme Goyette. «On lui a offert de la soupe et quand il l’a prise, ses mains étaient tellement mauves et gonflées, on aurait dit des mains mortes», poursuit-elle, avec un trémolo dans la voix.
«Chaque fois que je parle de ça, j’ai les larmes qui [me] montent aux yeux», explique-t-elle. «C’est la première paire de mains que j’ai vue dans cet état, mais après ça, j’en ai vu toute la journée.»
Peu de temps après, les trois véhicules ont été entourés d’itinérants qui ont patiemment attendu pour obtenir vêtements et repas.
«La majorité des gens étaient vraiment dans le besoin et prenaient tout», relate Mme Goyette. «Il y en a un, quand il a vu qu’on avait des vêtements chauds, il s’est mis à crier et à pleurer. Il n’en revenait pas qu’on puisse le couvrir.»
La Ville de Montréal a ouvert des refuges temporaires d’urgence jusqu’à dimanche pour venir en aide à cette population. Ariane et Noémie ont néanmoins constaté sur le terrain qu’il y avait plusieurs personnes à l’extérieur.
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Escortées par les policiers
Sur place, les bonnes samaritaines ont été interpellées par des agents de la Sûreté du Québec (SQ) qui leur ont demandé s’il leur restait assez de vêtements et de nourriture pour visiter le dessous du viaduc Atwater, où d’autres sans-abri passaient la nuit dans des tentes.
«Les itinérants indiquaient qu’ils avaient froid. [...] Les policiers sont allés à la Mission Old Brewery et ont rencontré un groupe de bénévoles», confirme Stéphane Tremblay, porte-parole de la SQ.
Après avoir répondu par l’affirmative, les bénévoles ont été escortées par les policiers vers ce campement de fortune.
Sur place: une triste scène se déroulait. Un homme qui ne pouvait plus endurer le froid s’est réfugié dans un des véhicules pour se réchauffer.
«Ses mains étaient bleues et noires, enflées», témoigne Noémie Charest. «C’était inhumain et je ne pouvais pas comprendre que les gens étaient dehors.»
Valérie Plante doit «aller sur le terrain»
Noémie et Ariane déplorent avoir vu autant de détresse lors de leur initiative.
«Je pense qu’il manque d’aide», soutient Noémie. «Je sais qu’il y a des centres et des ressources. Mais côté dons, je crois que les gens donnent beaucoup durant Noël, et ensuite il n’y a plus rien.»
De son côté, Ariane interpelle directement la mairesse de Montréal, Valérie Plante.
«Pour affirmer que ça va bien et que c’est sous contrôle, elle n’est clairement pas sur le terrain. Moi, je l’invite à aller en dessous du viaduc Atwater et de jaser.»
«Je pense que tous les ministres, mairesses et personnes de fonction devraient se rendre sur le terrain pour voir la situation. Quand on ne la vit pas, on ne peut pas faire les ajustements», renchérit Noémie Charest, qui a souligné la présence d’un ministre du gouvernement du Québec [Lionel Carmant] à la Mission Old Brewery, vendredi.