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Les politiciens choqués par les initiations sportives sordides

La classe politique a été bouleversée par les témoignages d’anciens joueurs de hockey junior

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Des politiciens de toutes allégeances, autant à Québec qu’à Ottawa, demandent de mettre un terme aux initiations sportives à la suite des témoignages bouleversants d’anciens joueurs de hockey junior de partout au Canada.

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«Ça n’a pas d’allure. C’est carrément de l’abus, de la maltraitance», a lancé aux journalistes la ministre fédérale des Sports, Pascale St-Onge, lundi, après avoir pris connaissance de la chronique de Martin Leclerc, de Radio-Canada, qui révélait des histoires de tortures, d’agressions physiques et sexuelles et d’humiliation à la suite de la demande d’action collective déposée par les ex-hockeyeurs Daniel Carcillo, Garrett Taylor et Stephen Quirk contre la Ligue canadienne de hockey et ses 60 équipes. 

Daniel Carcillo
Photo d'archives, Agence QMI
Daniel Carcillo

Celle-ci chapeaute la Ligue de hockey junior majeur du Québec (LHJMQ) ainsi que les ligues de l’Ontario et de l’Ouest.

Garrett Taylor
Photo tirée du site de la WHL
Garrett Taylor

«Je ne comprends pas que des adultes aient été témoins de ça et ont laissé ces événements-là se produire, a poursuivi Mme St-Onge. Mon message est clair aujourd’hui : les initiations doivent cesser. J’en ai entendu dans tous les sports, pas juste au hockey. Ça doit être interdit.»

  • Écoutez l'édito de Richard Martineau diffusé chaque jour en direct 8 h 45 via QUB radio :

Un juge rejette la demande

Au début de février, le juge Paul Perell, de la Cour supérieure de l’Ontario, a rejeté la demande d’action collective qui couvrait une période de 50 ans, stipulant qu’une équipe du Québec n’était pas responsable des actes survenus avec une formation de l’Alberta, par exemple. 

Dans son rapport, le magistrat avait toutefois précisé qu’il croyait les 19 victimes alléguées et il recommandait que des plaintes soient formulées de façon individuelle. 

«C’est un texte plus que troublant qu’on a pu lire ce matin [lundi], qui glace le sang. Comme mère, comme élue, comme ancienne athlète et également comme citoyenne, c’est extrêmement perturbant de lire ces faits allégués et d’imaginer ce qui peut se passer dans nos ligues juniors», a écrit à notre Bureau parlementaire la ministre caquiste responsable du Sport, du Loisir et du Plein air, Isabelle Charest. 

L’éléphant ou le crabe

Plusieurs des ex-hockeyeurs ayant livré des témoignages déconcertants ont évolué dans une ligue junior du pays au début des années 1980, comme l’a constaté Le Journal en consultant les documents de cour. Mais certains faits allégués remontent à moins de 10 ans et certaines des recrues avaient à peine 14 ans. 

«Nous avons été forcés de faire la “marche de l’éléphant”, a raconté un ancien joueur, dont le tribunal protège l’identité. Nous étions à quatre pattes en cercle. Chaque gars avait son nez dans les fesses de l’autre et une main sur le pénis de celui en avant de lui.»

«Un autre rituel consistait à marcher comme un crabe avec nos parties génitales dans les airs, a-t-il poursuivi. Nous avons formé des équipes de six jeunes. Chaque équipe plaçait du ruban adhésif sur le pénis du premier participant qui devait marcher avec les bras derrière lui et le pénis en l’air. Un coéquipier devait ensuite utiliser sa bouche pour lui retirer le ruban et le replacer sur le pénis du suivant.»

Un autre ex-athlète a raconté qu’il était couché sur le ventre dans un lit d’une chambre d’hôtel et qu’un vétéran était assis sur lui, l’empêchant de respirer. 

«Quand je me tournais la tête, il me giflait avec son pénis en riant. Ç’a duré environ 20 minutes. J’étais terrifié.»

Des entraîneurs complices

Un ancien joueur se souvient d’avoir été déshabillé de force et obligé de boire beaucoup d’alcool en peu de temps à l’aréna. Il a été rasé de la tête au pied, incluant les poils pubiens, et ses organes génitaux ont été recouverts de crème analgésique. Des joueurs plus âgés ont aussi pénétré son anus avec leurs doigts couverts de la même crème.

Plusieurs ont relaté qu’ils ont été coupés et ont affirmé que des vétérans ont inséré des objets, dont des bâtons de hockey, souvent chauffés, dans leur anus. Certains soutiennent qu’ils ont été battus, parfois devant des entraîneurs qui auraient participé aux sévices.

Nu dans les rues

Les abus ne survenaient pas seulement lors des initiations, car un ancien joueur prétend avoir été agressé sexuellement une quarantaine de fois au cours d’une saison. 

Un ex-joueur de la LHJMQ a raconté au Journal qu’il avait fait un voyage dans la toilette de l’autobus avec quatre ou cinq joueurs et qu’il avait dû marcher nu dans les rues pour se rendre à l’aréna, sans toutefois avoir été traumatisé.

«On le faisait, on voulait montrer qu’on n’avait pas peur, a-t-il raconté sous le couvert de l’anonymat. On voulait bien paraître devant les vétérans. Je connais aussi des policiers et des pompiers qui ont vécu des initiations assez corsées qui seraient inacceptables aujourd’hui. Il faut qu’on évolue.»

– Avec la collaboration de Marc-André Gagnon et Guillaume St-Pierre, Bureaux parlementaires, ainsi que de Nicolas Brasseur, Bureau d’enquête


Le hockey junior de partout au pays est éclaboussé par plusieurs scandales depuis des mois. De présumés viols collectifs auraient été commis par des joueurs de différentes ligues et même Hockey Canada a versé de l’argent à des victimes alléguées afin d’acheter leur silence.

Des élus révoltés

Photo d'archives, Agence QMI

« Cette culture dans le sport et ce genre de choses ne doivent plus se reproduire, jamais. J’offre mon entière collaboration et soutien à la ministre Isabelle Charest pour la suite. Cela va bien au-delà de la partisanerie. »

– Enrico Ciccone, député provincial libéral et ancien hockeyeur professionnel

Photo Stevens LeBlanc

« Les mots me manquent pour exprimer ce que j’en pense : dégueulasse, ignoble, inacceptable. Mais ça fait trop longtemps que ça dure, trop longtemps que trop de gens ferment les yeux. »

– Gabriel Nadeau-Dubois, chef parlementaire de Québec solidaire

Photo d'archives, Agence QMI

 « Ces initiations barbares doivent cesser immédiatement. Ça n’apporte absolument rien. Ça cause beaucoup de tort à des sportifs et à des humains. Je n’ai jamais compris aussi la nécessité de tels gestes avilissants pour créer l’esprit d’équipe. »

– Pascal Bérubé, député péquiste

Photo d'archives, Agence QMI

« Cette histoire (une autre !) est révoltante. J’ai justement rencontré la ministre Isabelle Charest la semaine dernière pour parler notamment de la sécurité des jeunes sportifs et je pense qu’on s’entendra rapidement pour agir à l’Assemblée nationale. »

– Vincent Marissal, député solidaire

Photo Pierre-Paul Poulin

« Il faut absolument, comme société, prendre un pas de recul et se questionner sur la culture et l’environnement parfois toxiques dans lesquels évoluent nos jeunes. »

– Isabelle Charest, ministre québécoise responsable du Sport, du Loisir et du Plein air

Photo d'archives, Agence QMI

« Il doit y avoir des sanctions contre les joueurs qui font ça et les adultes qui sont témoins et qui ne font rien. »

– Pascale St-Onge, ministre fédérale des Sports

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