Les voleurs se moquent des supports à vélo municipaux à Montréal
Ils parviennent à les couper pour dérober des vélos, ce qui «décourage» le fournisseur de ces infrastructures
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Des supports à vélos installés par milliers à Montréal ne font pas le poids contre des voleurs de mieux en mieux équipés qui parviennent à les couper, au grand dam des cyclistes et même du fournisseur de ces infrastructures.
«[L’administration Plante], ils prônent le vélo et veulent encourager ça, donc il faudrait qu’ils mettent des installations qui soient sécuritaires pour que les gens n’aient pas à s’acheter quatre vélos par année», s’insurge Isabelle Dionne.
La résidente du Plateau-Mont-Royal était sous le choc lorsqu’elle a vu que son vélo acheté neuf à 700 $, qui était attaché avec un cadenas ultrasolide, avait été dérobé en plein jour, alors qu’elle l’avait laissé quelques heures pour une session dans un centre d’escalade sur l’avenue Papineau.
C’est qu’au lieu de s’en prendre à son cadenas, le malfaiteur a plutôt visé le support de la Ville de Montréal, qu’il a pu couper afin de repartir avec le vélo de Mme Dionne.
«J’ai tiré un peu dessus [le poteau coupé], j’ai vu que tu peux passer facilement le cadenas dans l’ouverture», raconte Mme Dionne, qui a ainsi réalisé que le vol a pu s’effectuer assez rapidement.
Mme Dionne n’est pas la seule à avoir été victime de ce stratagème. Sur Facebook, un cycliste a raconté en novembre s’être fait voler son vélo électrique en publiant une photo d’une coupure faite pratiquement au même endroit sur un support identique à Montréal.
Le Journal a également trouvé deux autres supports, dans Rosemont–La Petite-Patrie et sur Le Plateau-Mont-Royal, ayant subi cette même coupure.
Le fournisseur «découragé»
En entrevue avec Le Journal, le propriétaire de GG Innox, principal fournisseur des supports à vélos publics installés dans divers arrondissements de Montréal, n’a pas caché son exaspération face à la détermination des voleurs.
«Je suis un peu découragé!», lâche Michel Gendron, qui soutient que ses supports en acier inoxydable sont «les plus épais» sur le marché et qu’il en a fourni des milliers à des arrondissements de Montréal.
Sauf qu’en 2023, un voleur bien équipé et déterminé parvient toujours à ses fins, peu importe le matériau ou son épaisseur, soutient-il. «Tu ne peux rien faire pour ça.»
M. Gendron explique que l’accessibilité de plus en plus grande des scies à batterie, particulièrement des meuleuses, permet aux voleurs de couper en quelques secondes un support à vélo.
Il rapporte même que dans plusieurs cas, les voleurs ont dérobé des supports au complet en coupant les ancrages au sol.
«Un voleur qui voit un vélo de 5000 $ et qui veut le voler, on ne peut pas l’en empêcher», résume-t-il.
Il se dit prêt à discuter avec la Ville de Montréal pour contrecarrer l’avancée technologique des voleurs, mais avoue qu’il n’a «aucune idée de la façon» de prévenir ce fléau pour le moment.
Comment se protéger?
C’est le même constat chez Vélo Québec, qui soutient que les modèles de supports à vélos utilisés par la Ville de Montréal «font partie de ce qu’ils recommandent».
«Face à un voleur vraiment déterminé et outillé, il n’y a rien à faire», soutient la directrice des programmes, Magali Bebronne, qui recommande de multiplier les obstacles en barrant son vélo afin de décourager le voleur. «On essaie de dissuader et, c’est plate à dire, de faire en sorte que notre vélo soit moins facile à voler que celui du voisin.»
Si ce type de support à vélo risque de rester la norme sur les rues commerciales en raison du peu d’espace qu’il prend, d’autres solutions sont mises de l’avant par Vélo Québec pour mieux sécuriser les vélos stationnés.
«Il y a les stationnements sécurisés à accès restreint. Il y a de plus en plus de fournisseurs sur le marché québécois qui offrent des boîtes de sécurité qui vont se débarrer avec une application. C’est quand même une question qui devient de plus en plus importante parce qu’avec les vélos avec assistance électrique qui valent jusqu’à 5000 $, l’incitatif est élevé.»
La Ville de Montréal a indiqué au Journal que l’installations des supports à vélos relève des arrondissements et nous a renvoyés vers ceux-ci.
«La Ville est consciente des problématiques de vol de vélos et travaille de concert avec différents partenaires pour contrer ce problème», a indiqué la relationniste Karla Duval, rappelant l’existence du service d’enregistrement de vélo Garage 529 pour lutter contre le vol géré par le Service de police de la Ville de Montréal.
D’ailleurs, la Ville a mis en place un projet-pilote de casiers à vélo sécurisés près de l’ETS de 2020 à 2021, mais «l’achalandage a été relativement limité», souligne Mme Duval.