Pollution de l'air: des quartiers près d'écoles primaires pires que des autoroutes
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Les Québécois qui respirent un air pollué ne vivent pas toujours à côté d’une autoroute ou d’une usine. Plusieurs endroits où on trouve le plus de contaminants sont des quartiers résidentiels, dont certains à proximité d’écoles primaires.
L’école primaire Les Primevères, à Québec, est l’endroit où l’on compte le plus de jours où la qualité de l'air était mauvaise en 2021 en raison des particules fines (PM2,5).
Ces dernières entraînent des problèmes de santé importants, dont des cancers, et causent des pertes économiques chiffrées à 30 milliards $, au Québec.
À Terrebonne, les quantités de particules fines dans le parc Vaillant, au cœur d’un quartier résidentiel où se trouve l’école primaire Esther-Blondin, sont aussi parmi les plus élevées dans la province, révèlent des analyses de notre Bureau d’enquête.
Même la station située juste à côté de l’échangeur Décarie, à Montréal, compte près de deux à trois fois moins de journées où la qualité de l’air est mauvaise qu’à ces deux endroits.
Ces deux stations ont un point en commun: elles sont entourées de nombreuses maisons munies d’un poêle à bois.
NOMBREUX DÉPASSEMENTS
Les particules fines sont suivies depuis une vingtaine d’années seulement, au Québec. En 2021, notre réseau de surveillance de la qualité de l’air comptait quelque 63 stations qui analysent la présence de différents contaminants. Pour les 49 stations qui mesurent les particules fines, nous avons comparé les moyennes annuelles.
On remarque que plusieurs stations de la Ville de Québec comptent parmi les moyennes les plus élevées.
Nous avons également constaté que les quantités de particules fines observées au Québec dans presque toutes les stations dépassent les lignes directrices l’Organisation mondiale de la santé (OMS). /
Ces lignes directrices ont été réajustées en 2021 à la lumière des nouvelles connaissances scientifiques, ce qui est une première depuis 2005. La moyenne annuelle recommandée de particules fines a ainsi été réduite de moitié, passant de 10 à 5 μg/ m3 (microgrammes par mètre cube).
Ce n’est toutefois pas une norme légale. «C’est une invitation à toujours viser des niveaux de polluants les plus faibles possibles», explique Audrey Smargiassi, chercheuse associée à l’INSPQ et experte de la qualité de l’air et ses effets sur la santé.
«On est loin [des cibles de l’OMS], mais des solutions sont à portée de main», poursuit Johanne Elsener, présidente de l’organisme Santé urbanité.
Et on le voit à Rouyn-Noranda avec les émissions d’arsenic ou encore à Québec avec la présence de nickel dans Limoilou, les Québécois sont de plus en plus préoccupés par la qualité de l’air qu’ils respirent.
La norme canadienne annuelle est de 8,8 μg/m3, depuis 2020. Mais la province la considère seulement comme «un objectif».
Avec 9,46 μg/m3, les concentrations de la station de l’école des Primevères dépassent la norme canadienne et sont près du double de celle de l’OMS.
PAS DE RÉVISION
Or le cabinet du ministre de l’Environnement du Québec nous confirme qu’aucune révision de la norme de particules fines n’est dans les plans pour le moment.
Il précise que le responsable est très souvent le chauffage au bois et qu’il revient aux municipalités d’intervenir. Même s’il encourage cette démarche, il rappelle qu’il «faut être conscient de certaines réalités régionales et pour lesquelles le chauffage au bois est un moyen essentiel en temps froid».
«C’est un problème qu’on ne prend pas assez au sérieux, déplore Mme Elsener.
«Ça pourrait être davantage considéré dans nos choix collectifs concernant le transport, le chauffage, la production d’énergie et les changements climatiques», croit pour sa part le Dr Philippe Robert, de la direction de santé publique du CIUSSS de Capitale-Nationale.