Montréal, laide même sous la neige
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Je suis née à Montréal, comme ma mère. J’ai éprouvé longtemps un attachement affectif à ma ville natale.
C’est en rentrant au pays après un long séjour d’études à Paris que j’ai compris que Montréal avait une âme vibrante et joyeuse. Qu’elle était ouverte à son époque, mais qu’elle n’était pas une belle ville.
En hiver, en revanche, sa laideur était recouverte de neige. Je me souviens encore des vers du poète montréalais Albert Lozeau, né au XIXe siècle, que je récitais en classe au primaire dès la troisième année. « Quand il neige sur mon pays/De gros flocons couvrent les branches,/Et les regards sont éblouis/Par la clarté des routes blanches. [...] Quand il neige sur mon pays,/On voit s’ébattre dans les rues/Les petits enfants réjouis/Par tant de splendeurs reparues. »
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Postmodernisme
Eh bien, à cause de multiples chantiers de construction idéologiquement orientés par une vision postmoderne agricolo-jardinière, Montréal, la métropole économique et commerciale du Québec, a été défigurée. Même sous des centimètres de neige, les quartiers montréalais aux rues et aux trottoirs défoncés par des travaux de tout genre n’arrivent pas à camoufler même la saleté qui s’y est installée.
Durant les tempêtes de neige, la laideur de Montréal ne s’efface guère. Car les graffitis et autres tags échappent aux caprices de la météo.
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Combien d’années encore Montréal sera-t-elle éventrée comme si des tornades s’étaient abattues sur elle ?
À l’évidence, les citoyens du cru l’ont compris et quittent l’île de Montréal pour les grandes banlieues en voie d’urbanisation.
Ou, en ce qui concerne les plus nantis, vers des secrets bien gardés que sont des villages de campagne où le poème de Lozeau prend tout son sens. « Quand il neige sur mon pays,/C’est que tout le ciel se disperse/Sur la montagne et les toits gris/Qu’il revêt de sa claire averse, [...] C’est le plus beau pays du monde/Quand il neige sur mon pays ! »