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Encore du travail à faire: seulement le tiers des articles scientifiques parus dans le monde écrits par des femmes

Florence Meney
L’autrice Florence Meney a publié en 2021 le livre Têtes chercheuses afin de faire rayonner 20 figures féminines de la science au Québec. Photo Pierre-Paul Poulin


Les deux tiers des auteurs d’articles scientifiques parus dans le monde sont des hommes, déplorent des experts qui y voient une science peu représentative de la société.

«Quand tu prends un groupe de gars dans une salle, les conversations sont différentes que lorsqu’une ou plusieurs femmes sont présentes. C’est la même chose en recherche», lance Vincent Larivière, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les transformations de la communication savante, qui souhaiterait une meilleure équité des genres dans les laboratoires et instituts universitaires consacrés à la science. 

C’est en analysant le ratio homme-femme dans une base de données comptant plus de 20 millions d’articles scientifiques parus entre 2008 et 2020 qu’il est parvenu à la conclusion que seulement le tiers des auteurs (31 %) étaient des femmes. Le Portugal compte le plus d’autrices (44 % des signataires) et le Japon (17 %) a la plus faible diversité. 

Le Canada fait légèrement mieux que dans le reste du monde avec une moyenne de 33 % d’articles signés par des femmes. 

Si des domaines comme la psychologie s’approchent de la parité avec près de 50 % d’autrices, d’autres comme la physique, le génie et les mathématiques en sont encore loin (autour de 20 %). 

Femmes oubliées

Avec sa collègue américaine Cassidy Sugymoto, professeure à l’Université Georgia Institute of Technology, à Atlanta, le chercheur de l’Université de Montréal publie ce mois-ci aux presses de l’Université Harvard un livre portant sur le sujet : Equity for Women in Science

Ce livre, que Le Journal a pu consulter, révèle que les femmes courent 17 % plus de risque de mourir en automobile et sont 47 fois plus susceptibles d’être blessées que les hommes. 

Un phénomène attribué au fait que, jusqu’en 2003, les tests de sécurité routière avaient toujours été réalisés avec des mannequins à stature masculine.

Les exemples de ce type sont nombreux en médecine et en pharmacie, où les tests cliniques ont très longtemps été menés auprès d’hommes blancs d’âge semblable. 

Les cycles menstruels et la morphologie des femmes n’étaient pas des critères tenus en compte. Des réalités qui sont mieux intégrées quand des femmes font partie des équipes qui rédigent les protocoles de recherche. 

La parité dans un siècle

Point encourageant, le nombre d’autrices est en hausse un peu partout, souligne le professeur Larivière. Mais au rythme actuel, il calcule que la parité ne sera pas acquise avant 2144 en mathématique, en 2158 en physique et en 2144 en génie. 

Si les femmes forment pourtant la majorité des effectifs universitaires, du moins au Québec, elles sont beaucoup moins nombreuses à choisir la carrière scientifique après la maîtrise et le doctorat. 

Selon le professeur Larivière, c’est le contexte social défavorable qui pousse les femmes à renoncer aux métiers scientifiques. 

«Avec la pandémie, ce problème a été encore plus accentué. Les femmes ont été plus nombreuses que les hommes à renoncer à leur emploi pour s’occuper de l’école à la maison et des tâches ménagères. Le retard n’a pas été rattrapé encore», souligne-t-il.

20 cerveaux féminins mis en valeur dans un livre 

Trouvant les femmes scientifiques trop humbles, une autrice montréalaise a déniché 20 cerveaux féminins de la province pour les faire rayonner.

À force de côtoyer certains des plus grands cerveaux du Québec, Mme Meney a remarqué que les femmes étaient souvent cantonnées aux rôles secondaires dans la communauté scientifique. 

On connaît peu les «cerveaux exceptionnels» qui font de la science au féminin, déplore-t-elle.

«Les meilleures ont tendance à demeurer humbles. Peut-être par manque de modèles», dit l’autrice de Têtes chercheuses, un livre qui présente 20 figures féminines de la science au Québec.

La pédiatre et infectiologue Caroline Quach Thanh, par exemple, dit que c’est la force de caractère de sa mère et de sa grand-mère vietnamiennes qui l’a portée vers une carrière scientifique.

Bien avant d’être sur tous les écrans durant la pandémie, la Dre Quach Thanh avait préparé ses collègues à la venue d’une infection de vaste ampleur. 

«Elle pressentait une épidémie majeure qui allait nécessiter un plan de campagne complet et cohérent», rapporte Florence Meney, aussi relationniste pour l’Institut de recherches cliniques de Montréal.

Du restaurant chinois à MSF

Quand elle était enfant, la Dre Joanne Liu pliait des serviettes en papier dans le restaurant de ses parents à Québec. 

Elle les aidait à prendre les commandes sans savoir que ses succès scolaires la mèneraient à intervenir auprès de populations touchées par la guerre et les catastrophes naturelles aux quatre coins du monde. 

De sa culture familiale, l’ancienne directrice de Médecins sans frontières a gardé une solide éthique du travail.

Des efforts remarquables

Mona Nemer, la biologiste moléculaire devenue conseillère scientifique en chef du premier ministre du Canada, a fui la guerre du Liban avant de mettre le cap sur le Canada avec sa famille. C’est le plaisir de découvrir la chimie et les mathématiques à l’école qui l’a conduite vers la science.

«Ce livre aurait pu en présenter 100 autres», soupire l’autrice, qui tient à souligner les efforts remarquables du Québec pour promouvoir dans divers programmes les carrières scientifiques auprès des jeunes femmes.

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