Explosion des plaintes pour fraudes sur les médias sociaux... et ce ne serait que la pointe de l'iceberg
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Le nombre de dossiers de fraudes directement liées aux médias sociaux a explosé à la Sûreté du Québec, alors qu'il s'est multiplié par six en cinq ans seulement, mais cela ne représente toujours que la pointe de l’iceberg, selon des experts.
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Le Journal a obtenu auprès de la Sûreté du Québec le nombre de dossiers de fraudes liées directement aux médias sociaux qui sont ouverts annuellement. Il appert que les plaintes sont passées de 118 (2017) à 728 (2022), soit une augmentation vertigineuse de 517% en cinq ans.
«C’est une sous-représentation de la réalité», lance d’emblée l’expert en sécurité informatique Steve Waterhouse.
«La gestion des fraudes ou de comptes de médias sociaux, c’est une catastrophe au Canada», déplore de son côté Luc Lefebvre, le cofondateur de Crypto.Québec.
Ces dossiers, qui font l'objet d'une enquête par la SQ, font par exemple état de vol d’identité, de supposition de personne, de marketing de masse, de fausse réclamation au gouvernement ou à l’assurance, tandis que les victimes se font piéger via les médias sociaux.
Centre antifraude
Bien que l’augmentation du nombre de cas en cinq ans soit faramineuse à la Sûreté du Québec, il semble que ces chiffres soient loin de refléter la réalité. En effet, selon le bulletin du Centre antifraude du Canada (CAFC), pas moins de 90 377 signalements ont été faits d’un océan à l’autre en 2022.
Pire, le CAFC ajoute cette note en bas de page: «Il est estimé que 5%-10% des victimes de fraude feraient un signalement au CAFC.»
Ce manque de données claires inquiète les experts interrogés. «On est en perte totale et complète de contrôle là-dedans», déplore Luc Lefebvre.
«Le message qui est passé aux citoyens, c’est de rapporter aux policiers. Mais quand ça fait quatre fois que le citoyen se fait voler son identité, il y a perte de confiance», constate M. Watherhouse.
Manque de ressources
«Les corps policiers à tous les niveaux, incluant la GRC au Canada, n’ont pas le personnel pour faire toutes les enquêtes selon les bonnes pratiques», ajoute l’expert. Il faut dire que ces enquêtes sont coûteuses, complexes et longues et impliquent souvent des juridictions étrangères.
Le Centre antifraude du Canada est un organisme qui ne fait que recueillir l’information sur la fraude au Canada, sans avoir nécessairement les outils pour punir les fraudeurs. Le mois de mars étant le mois de la prévention de la fraude, force est de constater que les fraudeurs qui utilisent les médias sociaux ont encore une bonne longueur d’avance sur les autorités.
«Je m’attends à ce que ça éclate un jour ou l’autre. Qu’il y ait un nombre tellement élevé qu’on ne peut plus l’ignorer», espère Luc Lefebvre.
Nombre de dossiers de fraudes liées aux médias sociaux (Instagram, Facebook, TikTok, Twitter, etc.) qui ont été ouverts à la Sûreté du Québec entre 2017 et 2022:
- 2017 ➞ 118
- 2018 ➞ 170
- 2019 ➞ 241
- 2020 ➞ 513
- 2021 ➞ 603
- 2022 ➞ 728
Total général ➞ 2373