Le président sud-coréen salue un «nouveau chapitre» dans les relations avec le Japon
Coup d'oeil sur cet article
Le président sud-coréen Yoon Suk Yeol a salué mercredi dans une interview à plusieurs médias dont l'AFP la coopération croissante avec le Japon sur des questions allant de la Corée du Nord aux semi-conducteurs, déclarant qu'elle faisait partie d'un «nouveau chapitre» historique pour les deux pays.
M. Yoon se rendra à Tokyo jeudi, sa première visite depuis sa prise de fonctions en 2022.
Cette visite de deux jours fait suite à sa décision, controversée, de tenter de régler définitivement un différend historique lié aux Sud-Coréens victimes de travail forcé durant l'occupation japonaise (1910-1945).
Le plan de M. Yoon prévoit d'indemniser les victimes sans la participation financière directe de Tokyo, ce qui a provoqué la colère de certaines d'entre elles.
Ces dernières estimaient que cela ne répondait pas à leur demande d'excuses complètes et d'indemnisation directe de la part des entreprises japonaises impliquées.
Mais M. Yoon s'est dit convaincu que son nouveau plan d'indemnisation des victimes fonctionnerait. «Le gouvernement japonais se joindra à nous pour ouvrir un nouveau chapitre des relations entre la Corée et le Japon», a-t-il assuré dans cette interview écrite.
«Le Japon a exprimé de profonds remords et des excuses sincères en ce qui concerne son passé colonial», a-t-il ajouté.
La péninsule de Corée a été sous le joug colonial nippon pendant 35 ans, au cours desquels environ 780 000 Coréens ont été réduits au travail forcé, selon des données de Séoul. Des dizaines de milliers de femmes ont, elles, été forcées de se prostituer dans des maisons closes militaires japonaises.
M. Yoon compte mettre un terme à ce différend historique dans l'optique de resserrer les liens avec Tokyo - un allié régional clé de Washington, partenaire de Séoul en matière de sécurité - face aux menaces grandissantes de la Corée du Nord.
- Écoutez la chronique de Loïc Tassé, spécialiste en politique internationale au micro de Benoit Dutrizac sur QUB radio :
«Travailler ensemble»
En 2022, le Nord a qualifié d'«irréversible» son statut de puissance nucléaire et a récemment appelé à une augmentation «exponentielle» de la production d'armes, y compris d'armes nucléaires tactiques.
La Corée du Sud «ne reconnaîtra jamais la Corée du Nord comme un État nucléaire, quelles que soient les circonstances», a insisté M. Yoon.
Il a par ailleurs évoqué des rapports faisant état de personnes mourant de faim en Corée du Nord - soumis à un strict blocus auto-imposé depuis le début de la pandémie de COVID-19 en 2020.
«Le régime nord-coréen pourrait facilement résoudre ses problèmes de pénurie alimentaire s'il injectait l'argent qu'il consacre au développement du nucléaire et des missiles dans l'amélioration des conditions de vie de sa population», a-t-il avancé.
Séoul et Tokyo augmentent tous deux leurs dépenses en matière de défense et organisent respectivement des exercices militaires conjoints, ce qui, selon M. Yoon, est essentiel pour la stabilité régionale et mondiale.
«La Corée et le Japon ont de plus en plus besoin de coopérer en cette période de polycrise où les menaces nucléaires et balistiques de la Corée du Nord s'intensifient», a soutenu M. Yoon.
«Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre du temps en négligeant les relations tendues entre la Corée et le Japon. Je pense que nous devons mettre fin au cercle vicieux de l'hostilité mutuelle et travailler ensemble à la recherche des intérêts communs de nos deux pays.»
Restrictions commerciales
Toutefois, les mesures qu'il a prises pour se rapprocher du Japon ont été vivement critiquées par des militants sud-coréens, qui les ont jugées «insultantes» pour les victimes de travail forcé, et contraires à certaines décisions de justice.
Un jugement historique rendu en 2018 - parmi d'autres verdicts sud-coréens - ont ordonné à des entreprises, dont Mitsubishi Heavy Industries, de verser des indemnités aux victimes coréennes, une décision qui a fait tomber les relations Séoul-Tokyo à leur plus bas niveau depuis des années.
L'année suivante, le Japon a imposé des contrôles à l'exportation sur des matériaux industriels clés nécessaires à l'industrie des puces sud-coréenne et a retiré le pays de sa liste des «nations commerciales préférées». Séoul a déposé une plainte auprès de l'Organisation mondiale du commerce.
Les deux pays semblent désormais s'efforcer de lever les restrictions commerciales réciproques.
Début mars, la Corée du Sud a déclaré qu'elle suspendait sa plainte auprès de l'OMC concernant les restrictions d'exportations de certains produits japonais.
«La Corée et le Japon sont des nations clés dans des chaînes d'approvisionnement mondiales telles que la production de semi-conducteurs», a noté Yoon.
«Une coopération économique plus forte entre la Corée et le Japon contribuera probablement grandement à stimuler les chaînes d'approvisionnement mondiales.»