Cinq erreurs courantes quand on fait son testament seul
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De nombreux Québécois rédigent ce que l’on appelle un testament olographe, c’est-à-dire un document entièrement écrit et signé à la main.
C’est la forme la plus simple du testament, mais on y retrouve des erreurs huit fois sur dix, estime le notaire Michel Beauchamp, spécialisé dans la liquidation des successions et chargé de cours à la Faculté de droit de l’Université de Montréal.
Il détaille pour nous quelques-uns des pièges dans lesquels on tombe fréquemment lorsque l’on procède seul.
1. Ne penser qu’en fonction d’aujourd’hui
En préparant son testament ainsi, on commet souvent l’erreur de ne penser qu’en fonction de notre situation actuelle. « On se dit : aujourd’hui, j’ai une maison, une auto, un fonds de pension, et je décide de tout laisser à ma conjointe. Mais est-ce que la conjoncture sera encore la même à mon décès, tant d’un point de vue conjugal qu’au niveau de mes biens ? » souligne Me Beauchamp. Beaucoup de choses peuvent en effet changer, et le testament ne sera plus nécessairement adapté.
2. Ne pas prévoir l’effet du temps sur son testament
Le testament est un document qui est à la fois temporaire et permanent, prévient Me Beauchamp. Il arrive que l’on oublie l’effet qu’aura le temps sur les décisions prises au moment de sa rédaction. « J’ai en tête le cas d’une femme qui avait rédigé un testament en 1969, dans lequel elle prévoyait qu’à sa mort, ses deux enfants recevraient chacun 100 $ par mois. À l’époque, avec 100 $, on pouvait payer un loyer, mais à son décès en 1997, on était loin du compte », illustre-t-il.
Ou encore, on rédige une disposition qui ne sera plus appropriée au moment du décès parce que la situation de l’héritier aura changé.
3. Utiliser des termes inadéquats
Parce que la plupart d’entre nous ne maîtrisent pas les termes juridiques appropriés, on peut utiliser des mots inadéquats dans notre testament. « Par exemple, un homme a écrit dans un testament qu’il laissait tout son argent à son épouse. Au moment du décès, le tribunal s’est demandé ce que le défunt entendait par “argent” et a décidé qu’il s’agissait de l’argent qu’il avait dans ses poches au moment de sa mort », explique Me Beauchamp. Il ajoute que l’interprétation d’un testament est toujours un pari parce que le juge tentera de comprendre ce que la personne pensait au moment où elle a rédigé le document.
4. Ne pas réfléchir àtous les scénarios
Le fait que la personne n’ait considéré qu’un seul cas de figure est un problème courant. « Je me souviens d’un cas où une femme, qui avait très peur de l’avion et partait en voyage avec son conjoint, a rédigé un testament olographe dans lequel elle laissait tout à ses enfants juste avant son départ. Elle pensait que son avion allait s’écraser et que son mari allait mourir avec elle. Or, elle est décédée quelque temps plus tard dans d’autres circonstances, et son mari s’est retrouvé sans rien, car elle avait légué tous ses biens aux enfants », raconte Me Beauchamp.
5. Procrastiner
La moitié des Québécois n’ont pas fait de testament, un pourcentage énorme de la population. Qu’arrive-t-il si on décède sans avoir mis ses dernières volontés par écrit ? Dans ce cas, c’est le principe de la dévolution légale qui s’applique, c’est-à-dire que la loi décide qui recueillera la succession et classe les héritiers par ordre de priorité. Par conséquent, une cousine ou un oncle avec qui vous êtes fâché depuis des lustres pourrait hériter de vos biens.