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Voici comment l’inondation du réservoir Gouin a englouti deux fois un village attikamek

Attikamek
Photo tirée de Wikicommons Le village attikamek de Wemotaci est une réserve autochtone depuis le 8 juin 1853.

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Lorsque la Shawinigan Water and Power a harnaché la rivière Saint-Maurice pour en faire le réservoir Gouin en 1918, les habitants d’Opitciwan ont été relogés sur un site... qui a été noyé encore.

«La première inondation a laissé des traces profondes dans la mémoire collective. Des ossements de sépultures déterrées par l’eau partaient à la dérive. Les aînés ont longtemps parlé de cet événement en pleurant», rappelle David Boivin, conseiller politique au Conseil de la Nation Atikamekw.Un autre village de cette Première Nation allait payer le prix de l’industrialisation, puisque les habitants de Coucoucache se trouvaient dans le bassin de la rivière Saint-Maurice au moment de construire le barrage de Rapide-Blanc, en 1930. Le village est aujourd’hui disparu. 

Des Attikameks de Manawan vers 1900.
Photos tirées de McCord
Des Attikameks de Manawan vers 1900.

Mauvais souvenirs

Par compensation pour les déplacements forcés, la compagnie électrique a versé une somme de 380 $.

Pour les Attikameks qui étaient passés d’un mode de vie nomade à la sédentarisation en quelques décennies à peine, ce choc de la civilisation n’avait rien de positif.

«Avant l’instauration de la Loi sur les Indiens en 1885, transformant une partie de notre territoire en une réserve, Wemotaci était un lieu de rassemblement», explique M. Boivin, qui a été chef de cette communauté de 2011 à 2015.

Le village, qui compte aujourd’hui 2000 personnes, forme environ le quart du peuple attikamek. Opitciwan et Manawan, avec environ 3000 habitants, forment les deux autres villages. Plus de 60 % de la population a moins de 35 ans. 

Des Attikameks d’Opitciwan au poste de traite de la Compagnie de la Baie d’Hudson vers 1921.
Photo tirée de Wikicommons
Des Attikameks d’Opitciwan au poste de traite de la Compagnie de la Baie d’Hudson vers 1921.

Une langue vivante

On assiste actuellement à un renouveau de la culture attikamek, soutient Lisette Petiquay, conseillère à la culture et à l’éducation au Conseil de la Nation.

«La langue est parlée par 95 % de la population. Nous l’enseignons dès la maternelle et jusqu’à l’école secondaire», explique cette ancienne enseignante de 59 ans. Lorsqu’elle était enfant, à Opitciwan, c’était le français qui était la langue scolaire. Même si cette langue demeure fragile, elle est très valorisée dans les familles, soutient-elle.

Un dictionnaire français-attikamek a été lancé l’an dernier. Fruit du travail des aînés en collaboration avec des linguistes, ce dictionnaire est à la disposition des enseignants. Il sera «d’une grande utilité pour la conservation de notre langue», disait au lancement Nicole Petiquay, coordonnatrice linguistique du projet. 

Un Attikamek organise l’Expédition Premières Nations

En tout, 56 personnes franchissent 4000 km pour sensibiliser les gens à la cause autochtone. «Là, ma motoneige est complètement scrap, mais à part ça, tout va bien», lance Christian Flamand, en entrevue au Journal

Joint chez les Cris de Waskaganish, où les 56 membres de l’Expédition Premières Nations viennent de faire halte dans leur périple de près de 4000 km à travers les bois, M. Flamand explique que les bris mécaniques sont les menaces qu’il craint le plus pour ce projet qui les mène jusqu’au territoire naskapi de Kawawachikamach. Le froid n’est pas un problème, «même à 40 sous zéro comme ce matin», ajoute-t-il. C’est en 2021 qu’il a eu l’idée de rassembler des voyageurs autochtones autour d’un projet sans précédent : rallier en plein hiver un maximum de nations pour «attirer l’attention du public sur la cause autochtone».

Le chef d’expédition a obtenu la collaboration de plusieurs conseils de bande, pour un budget de plus de 4 M$. Des braves venant de cinq nations et des allochtones se sont présentés à Manawan le 16 février dernier. Le plus jeune motoneigiste a 17 ans et le plus vieux en a 75; on compte 11 femmes dans le groupe, lequel franchit environ 300 km par jour. «Les nations ne font qu’un dans cette aventure, et la transmission du feu sacré partout sur le territoire ancestral nous rassemblera tous», précise Christian Flamand. Des cérémonies sont organisées à l’occasion du passage de l’expédition, qui a pris fin le 3 mars. On rend hommage aux enfants victimes des pensionnats autochtones, aux femmes disparues ou assassinées et à Joyce Echaquan, décédée en 2021 à l’hôpital de Joliette. 

LE «PEUPLE DE L’ÉCORCE»

  • Les Attikameks sont surnommés le «peuple de l’écorce» en raison de l’utilisation artisanale de l’écorce de bouleau. Ils savent fabriquer des canots et des paniers ornés de motifs propres à leurs traditions.
  • Il y a six saisons chez les Attikameks: Takwakin (septembre et octobre), Pitcipon (novembre et décembre), Pipon (janvier et février), Sikon (mars et avril), Miroskamin (mai et juin) et Nipin (juillet et août). Chacune est associée à la vie traditionnelle, autour de la chasse et de la pêche.
  • Le territoire attikamek en Haute-Mauricie et dans Lanaudière a été fortement affecté par l’industrie forestière et par le développement hydroélectrique. Après le flottage du bois pendant plus d’un siècle, les centrales ont été construites le long de multiples cours d’eau de la région.

Source : Coop Nitaskinan

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