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«C’est les familles et non les garagistes qui subissent les contrecoups»: une éternité avant que l’auto soit réparée

Les délais au garage atteignent des sommets partout au Québec alors qu’il faut patienter jusqu’à douze mois

Réparation automobile
Photo fournie par Geneviève Pérusse Le véhicule de Geneviève Pérusse, une résidente de la Montérégie, a été impliqué dans un carambolage, en janvier 2022. Ce n’est que 10 mois plus tard qu’elle a pu le récupérer.

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Un malheur n’arrive jamais seul, comme le savent ceux qui ont eu un accident de la route récemment. Non seulement leur voiture est endommagée, mais ils doivent prendre leur mal en patience, faute d’arriver à la faire réparer.

Parlez-en à Geneviève Pérusse, une professionnelle en ressources humaines et mère de deux enfants de Sainte-Julie, en banlieue de Montréal. 

La jeune femme a eu le temps de tomber enceinte et d’accoucher avant que sa voiture soit réparée, l’an dernier. 

« On a été pris en otage et on a dû se battre », raconte-t-elle avec un calme qui n’est pas donné à toutes.

À la suite d’un carambolage sur l’autoroute en janvier 2022, son Santa Fe 2019 n’était plus carrossable. Ce n’est qu’après une « interminable » série de va-et-vient avec le garage qu’elle a pu le récupérer 10 mois plus tard, en octobre.

« Ça a pesé sur mon quotidien et ma grossesse. C’est les familles et non les garagistes qui subissent les contrecoups », déplore la femme de 31 ans dont le deuxième enfant a 6 mois aujourd’hui. 

Son constat : mieux vaut assurer un suivi serré, car les garagistes « ont l’excuse facile et n’ont pas de comptes à rendre ». 

« Ils me disaient qu’ils n’avaient pas les pièces, qu’ils n’étaient pas capables de faire le suivi des commandes, qu’ils avaient plein d’autres dossiers comme le mien », énumère la Julievilloise qui a besoin de sa voiture pour se rendre au travail.

C’est aussi elle qui a dû se charger de trouver une voiture de location, ce qui pourrait faire l’objet d’un reportage en soi. En résumé : un paquet de troubles de plus. 

Frédéric Desmarais, mécanicien propriétaire à Pointe-aux-Trembles, explique que, même si son chiffre d’affaires a beaucoup augmenté par rapport à 2019, la dernière année avant la pandémie, il « ne fait pas plus d’argent ».
Photo Julien McEvoy
Frédéric Desmarais, mécanicien propriétaire à Pointe-aux-Trembles, explique que, même si son chiffre d’affaires a beaucoup augmenté par rapport à 2019, la dernière année avant la pandémie, il « ne fait pas plus d’argent ».

Parfois des mois sans voiture

« Il y a même eu deux semaines où je n’ai pas eu de voiture de remplacement, et c’était juste avant l’accouchement », déplore Geneviève Pérusse.

Mais ç’aurait pu être pire, assure un expert en sinistre automobile qui préfère ne pas être nommé pour ne pas nuire à son emploi. Certains clients passent plusieurs mois sans voiture, faute d’inventaire chez les Hertz et Avis de ce monde. 

« C’est rendu une vraie blague. Et c’est sans parler des délais de réparation qui ont explosé et qui sont impossibles à gérer », raconte-t-il.

Des cas comme celui de Geneviève Pérusse, cet employé d’un important assureur québécois en traite tous les jours. 

Un rapide tour parmi les garages qui font affaire avec les assureurs suffit à comprendre. Chez Carstar Jonquière, par exemple, on ne prend aucune voiture carrossable avant 12 mois.

Dans la région de Québec, Fix Auto Charlesbourg ne peut prendre personne avant juillet. Même chose pour Carstar Gatineau Est, où le délai est de quatre mois. 

Et les factures gonflent

Les garages manquent d’employés, d’accord, mais l’expert en sinistre se demande « si les carrossiers ne profitent pas un peu de la situation ».

Car même si le prix des pièces n’est plus ce qu’il était, les factures de réparation « pas mal plus salées qu’avant » le sont encore moins.

Les pièces en tout genre sont de 20 % à 40 % plus chères qu’avant la pandémie, constate Alain Blondeau, propriétaire d’un garage depuis 1987 à Saint-Lambert, sur la Rive-Sud de Montréal.

Il donne l’exemple d’un pneu de dimension 205/55R16, « de loin le plus vendu », qui est passé de 150 $ à 225 $.

La valeur du temps des employés a aussi grimpé, selon Frédéric Desmarais, mécanicien propriétaire depuis 12 ans à Pointe-aux-Trembles, à Montréal.

Il facturait 65 $ l’heure en 2019, contre 105 $ aujourd’hui. 

« Mon chiffre d’affaires a augmenté de 25 % en un an, mais je ne fais pas plus d’argent qu’en 2019 », dit-il, dépité.

Dans son garage, entouré de ses employés, il se demande parfois s’il ne ferait pas mieux de retourner travailler comme salarié. 

Face à l’honnêteté de ce mécanicien entrepreneur, notre expert en sinistre se pose des questions. 

« Si ce gars-là arrive à réparer ton char en moins d’une journée en bûchant comme un malade, pourquoi Carstar et Fixauto n’y arrivent pas et pourquoi ils chargent beaucoup plus cher ? »

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