Budget Freeland: le Canada au bord de la récession

OTTAWA | Sans le sou et anticipant une récession, le gouvernement Trudeau mise le peu qu’il reste dans les coffres sur la transition verte dans un budget minimaliste qui propose peu de mesures neuves.  

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«C’est relativement limité en termes de priorités. On a mis l’accent sur l’économie verte, c’est le gros morceau», résume Jimmy Jean, économiste en chef de Desjardins, en épluchant les quelques 288 pages du budget fédéral 2023 présenté hier. 

Ce plan prévoit plus de 18 G$ pour la transition verte. Le gros de la somme ira à des crédits d’impôt, en particulier pour stimuler l’investissement dans l’électricité propre. 

«La colonne vertébrale du plan, c’est l’électricité propre, c’est un grand avantage industriel que nous avons et que nous devons stimuler», a déclaré un haut fonctionnaire de Finances Canada, indiquant qu’il faut doubler l’investissement dans ce secteur. 

Il s’agit de la réponse canadienne à l’investissement vert massif de près de 400 G$ que le gouvernement des États-Unis a mis en branle dans les derniers mois avec sa Loi pour la réduction de l’inflation. 

Des programmes sociaux

C’est donc bien moins que ce que prévoient nos voisins du sud, mais le gouvernement devait garder un peu de sous pour autres choses. Il a choisi d’allouer 13 G$ au Régime canadien de soins dentaires promis au Nouveau Parti démocratique (NPD). 

L’autre dépense significative va aux Premières Nations et aux Inuits: 4 G$, essentiellement pour la mise en œuvre d’une stratégie de logement autochtone en milieu urbain, rural et nordique. 

Rien toutefois pour les autres Canadiens qui peinent à se loger, alors qu’«il y a une urgence dans ce secteur», s’inquiète M. Jean, déplorant que cet enjeu a clairement été «sacrifié» du budget 2023. 

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La caisse est vide

Mais la ministre des Finances Chrystia Freeland «est allée à la limite de ce qu’elle pouvait se permettre», indique Robert Asselin, vice-président en politiques publiques du Conseil canadien des affaires. 

C’est qu’après des années à dépenser sans compter, le gouvernement «n’a plus de marge de manœuvre» et a épuisé les surplus dont il aurait aujourd’hui besoin dans un contexte économique mondial nettement assombri, souligne l’économiste et ex-conseiller de l’équipe Trudeau. 

Après avoir martelé que les ombres n’étaient que passagères, Ottawa a retiré ses lunettes roses et admet désormais que la récession, même «légère», est à l’horizon a dit un haut fonctionnaire de Finances Canada. Elle plombe la croissance économique, donc l’argent que l’État reçoit et peu dépenser. 

«L’anticipation de la récession est très claire dans leur plan», souligne M. Jean. 

Dans le rouge

Ceci n’empêche pas Chrystia Freeland de continuer à dépenser plus d’argent qu’il n’en rentre dans les coffres de l’État, ce qui fait passer la dette estimée pour cette année à 1221 G$ puis à 1256 G$ l’année prochaine. 

Ainsi, alors que l’énoncé économique de l’automne prévoyait un surplus dans cinq ans, celui-ci s’est complètement évaporé, pointe M. Jean. 

«Ils ont tenté de limiter les dégâts en annonçant une revue stratégique des dépenses» qui a pour objectif de faire des économies dans l’appareil de l’État, indique l’économiste en chef de Desjardins.  

Mais «c’est du pelletage en avant», déplore-t-il. 

Ce qu’ils ont dit en réaction au budget 

«Le prix total de toutes les nouvelles dépenses annoncées dans ce budget équivaut à 4300 $ par famille au Canada. C’est presque assez pour héberger le premier ministre dans une chambre d’hôtel pour une nuit!» – Pierre Poilievre

«Je suis très fier que nous ayons pu forcer ce gouvernement à élargir le régime de soins dentaires. [...] C’est la plus grande expansion en soins de santé en une génération.» – Jagmeet Singh

«C’est un budget qui laisse tomber les gens et la planète. C’est très ciblé sur les choses qui n’auront pas d’impact.» – Elizabeth May

«[C’est] un copié-collé de l’énoncé économique de l’automne dernier. [...] C’est un budget à courte vue qui ne demande pas énormément de temps de planification tellement c’est mince.» – Yves-François Blanchet