Documentaire sur la tragédie de Lac-Mégantic: des citoyens prêts à poursuivre le combat
LAC-MÉGANTIC | Émus, indignés et galvanisés après avoir vu en primeur, mardi soir, deux épisodes de la série documentaire de Philippe Falardeau sur la tragédie ferroviaire qui a fait 47 morts, en 2013, des citoyens de Lac-Mégantic osent croire que cette œuvre fera changer les choses.
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«On va continuer le combat», a promis le porte-parole de la Coalition des citoyens pour la sécurité ferroviaire de Mégantic, Robert Bellefleur, lequel est lui-même un participant de la série Lac-Mégantic: ceci n’est pas un accident, après le visionnement à la Polyvalente Montignac.
«C’est très percutant parce qu’au-delà du fait qu’on dit que les gens de Lac-Mégantic sont résilients, ils sont aussi tenaces. Ils tiennent à une enquête publique indépendante, ils tiennent à savoir la vérité, ils tiennent surtout à ce que les responsables soient identifiés un jour.»
«On dirait que ma colère ne fait juste que s’attiser», venait d’ailleurs de lancer, quelques minutes plus tôt, une spectatrice lors d’une séance de questions, de réponses et de commentaires avec Philippe Falardeau, après la projection.
«Imaginez-vous si ça saute...»
Anne-Marie Saint-Cerny, dont le livre Mégantic: une tragédie annoncée a servi de base de travail à Philippe Falardeau, a dit que grâce au documentaire, «quelque chose ne pouvait pas ne pas se passer pour obtenir à la fois de la justice et à la fois prévenir d’autres Mégantic».
«C’est la première fois que j’ai ce sentiment», estime celle qui a rappelé que la situation ne s’est pas améliorée au centre-ville de Lac-Mégantic.
«Maintenant, on a 45 citernes de propane qui passent ici. Imaginez-vous si ça saute, il n’y en aura plus de Mégantic.»
Bémols
D’autres ne sont pas aussi optimistes. Le maire de la municipalité voisine de Frontenac, Gaby Gendron, ne se fait pas d’illusions.
«Je ne pense pas que ça change grand-chose, ni à Transports Canada, ni au CP, ni au CN. C’est triste à dire, mais c’est ça.»
Le cinéaste Philippe Falardeau pense lui aussi qu’il est peu probable qu’une enquête publique soit déclenchée un jour. Il se réjouit néanmoins de la réaction des Méganticois.
«Je ne voulais pas attiser la douleur, mais peut-être maintenir une certaine colère ou indignation. Je n’ai pas voulu jeter de l’huile sur le feu et, selon la réaction de la salle, je pense que c’est mission accomplie», a-t-il confié.
Vives émotions
Comme ce fut le cas lorsque la série Mégantic a été présentée aux gens de Lac-Mégantic, il y a deux mois, les émotions étaient vives durant et après la projection.
Isabelle Boulanger, qui a perdu son fils Frédéric Boutin le 6 juillet 2013, avait les yeux dans l’eau quand elle est venue à la rencontre des journalistes. «Ça a beau faire dix ans bientôt, ça rebrasse toujours des émotions», a-t-elle partagé.
Même Philippe Falardeau a été bouleversé en regardant son travail sur grand écran. «Moi, je l’ai vu 150 fois à force de le faire. À un moment donné, on devient un peu insensible. Là, en le regardant avec les gens d’ici, je dois avouer que j’ai trouvé ça difficile à revoir certaines scènes.»
- Lac-Mégantic: ceci n’est pas un accident sera présenté en compétition au festival Canneseries la semaine prochaine, puis au festival Hot Docs, à Toronto, à la fin avril.
- La série sera déposée sur la plateforme Vrai le 2 mai.