Hommage à un être cher: Camille Paré-Poirier s’inspire de sa grand-maman
Qui ne rêve pas d’immortaliser des moments avec des êtres chers ? D’enregistrer les voix de ceux qui vont bientôt partir ?
C’est ce qu’a fait Camille Paré-Poirier durant quatre ans avec sa grand-mère Pauline. La jeune actrice en a fait un balado documentaire Quelqu’une d’immortelle. Puis ce projet s’est transformé pour devenir une fiction intitulée Je viendrai moins souvent, qui prendra l’affiche dès mardi dans la salle intime du Théâtre d’Aujourd’hui.
« C’est une déclaration d’amour ce spectacle-là, confie l’autrice en entrevue téléphonique. J’allais voir ma grand-mère trois fois par semaine au CHSLD durant ses dernières années. Si on avait eu le même âge, on aurait été des copines. »
Plusieurs deuils
À la fin de ses études théâtrales en 2016, Camille Paré-Poirier débarque à Montréal, elle qui avait grandi à Québec. Elle a ainsi pu se rapprocher de sa grand-mère qui vivait dans la métropole.
« On a assisté à une inversion de nos rôles, dit-elle. Tout à coup, c’est moi qui prenais soin d’elle. Je la promenais en fauteuil roulant, je lui faisais écouter de la musique et je la sortais au restaurant. »
Atteinte de démence, Pauline a lentement commencé à décliner avant de s’éteindre en 2021 à l’âge de 96 ans.
« Elle a traversé toute sorte de deuils comme de perdre son mari, sa mémoire, sa vue, sa lucidité et sa mobilité, dit l’actrice. Elle en prenait conscience jusqu’au moment où elle a perdu contact avec la réalité. Au début, c’était violent pour elle, mais au fur et à mesure, elle ne s’en rendait plus compte. »
La créatrice souligne que la mort de sa mamie a été « très très difficile », mais le gros de sa peine avait été vécu avant la fin.
« C’est le concept de deuil blanc dont je parle un peu dans la pièce, affirme-t-elle. Il se fait par anticipation. »
Pas une héroïne
Elle ajoute qu’elle ne voulait pas créer un « spectacle culpabilisant », duquel les gens sortent en se disant qu’ils devraient prendre davantage soin de leurs aînés. Camille Paré-Poirier note que le travail du metteur en scène Nicolas Michon a été crucial pour se détacher de l’histoire réelle et pour creuser les personnages, même si l’essentiel de cette proposition s’est vraiment produit.
« On ne me dépeint pas comme quelqu’un dans le don de soi et qui est une héroïne, remarque-t-elle. Je parle de côtés dont j’ai honte. De plus, on montre que Pauline n’est pas une icône. »
Par conséquent, la pièce, qui se base sur les échanges audio entre les deux femmes, ne présente pas que de l’amitié et de la tendresse, mais aussi de la colère et des conflits.
Critique face à la gestion des CHSLD, cette œuvre met en lumière la notion de soin, qui est chère à l’autrice.
« On devrait faire plus souvent de la place aux autres, croit-elle. On est à une époque où on a besoin de douceur et de dire aux gens qu’ils importent. Chaque relation significative qu’on a avec quelqu’un est plus éphémère qu’on pense. »
► Je viendrai moins souvent est présentée au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui du 25 avril au 13 mai.