Un registre des loyers «clé en main» pour lutter contre la crise de l’habitation
Un nouveau registre des loyers à l’intention de toute instance gouvernementale, dont les municipalités, vient d’être mis sur pied par l’organisme Vivre en Ville dans le but de freiner les hausses de loyers abusives au Québec.
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Le projet a hérité d’une plateforme citoyenne qui existe depuis 2017 et qui avait été revampée en 2021. Elle vient cependant d’être mise aux normes gouvernementales.
Pour l’heure, le site web comprend les données déjà collectées grâce à des divulgations volontaires de citoyens, soit près de 15 000 loyers.
La plateforme pourrait être utilisée par toute instance gouvernementale qui le souhaiterait et ne sera plus mise à jour par les locataires. C’est ce qui permettrait à ce registre de se distinguer des précédentes initiatives citoyennes similaires, vante Vivre en Ville.
«Nous croyons que le Registre des loyers peut être un outil précieux pour les gouvernements dans leur mission de protéger les locataires contre les hausses de loyer abusives et freiner l’inflation immobilière», a fait valoir jeudi Christian Savard, directeur général de Vivre en Ville.
Rétablir un équilibre
Lorsqu’un logement est mis sur le marché, le propriétaire connaît l’historique de prix du loyer, ce qui n’est pas nécessairement le cas du locataire.
Pour le moment, les propriétaires doivent seulement informer tout locataire du plus bas prix payé au cours des 12 derniers mois pour le logement. Cette donnée est disponible dans la clause G du bail.
Cette situation serait donc au désavantage du locataire au moment de la négociation de son bail. Il ne serait pas en mesure de savoir si une hausse abusive de son loyer est appliquée, selon l’organisme.
«Un registre contribuerait à rétablir l'équilibre dans le rapport de force entre le propriétaire et le locataire, en plus d’offrir un tableau de bord fiable, exact et à jour sur la situation du marché locatif», a souligné M. Savard.
Le registre accessible en ligne présentera trois informations principales, à savoir l’adresse civique de l’unité, le montant du loyer mensuel et l’année de référence. Toutes ces données devront être actualisées chaque année.
L’initiative faisait partie d’une des recommandations mises en avant par Vivre en Ville pour lutter contre la crise du logement en août dernier.
L’organisme a reçu une contribution financière de Centraide du Grand-Montréal, de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) et de la Direction de santé publique de Laval pour créer le site web.
Lors de la dernière campagne électorale en 2021, la mairesse de Montréal Valérie Plante s’était engagée à mettre en place une certification pour les propriétaires montréalais avec un registre des loyers.
Pour l’instant, seules les villes de Laval, Rimouski, Gatineau et Carleton-sur-Mer ont fait part de leur intérêt pour un tel registre.
Selon le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ), la tenue d’un registre des loyers serait de la responsabilité de Québec.
«Plutôt qu’une multitude de registres municipaux, ce qu’il faut, c’est un registre provincial et obligatoire qui s’applique à tous les logements de la province», a affirmé Cédric Dussault, co-porte-parole du RCLALQ.
De son côté, la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ) s’est dite opposée à un registre public.
«Un tel projet va malheureusement afficher une étiquette et le prix des loyers sur tous les bâtiments locatifs, facilitant ainsi la spéculation immobilière et les évictions pour des rénovations majeures [...] puisque les loyers les plus bas seront plus facilement repérables par les investisseurs immobiliers», a réagi son porte-parole, Marc-André Plante.
Des hausses incontrôlables
À quelques semaines du 1er juillet, la situation demeure critique pour certains ménages qui tentent de trouver un loyer correspondant à leurs revenus, particulièrement à Montréal.
Selon un sondage Léger dévoilé jeudi, 32 % des locataires interrogés n’auraient ainsi pas le choix d’accepter une hausse de loyer abusive.
Environ 80 % d’entre eux ne seraient même pas au courant de la clause G dans le formulaire de leur bail pour évaluer si le loyer a augmenté ou non par rapport à la dernière année.
«On voit que lorsque les locataires déménagent, leur loyer augmente en moyenne de presque 20 %», a ajouté Adam Mongrain, directeur - Habitation à Vivre en Ville.
«C’est un rythme insoutenable, causé en partie par le manque d’information sur les loyers précédents», a-t-il soutenu.
Le coup de sonde a été réalisé auprès de 5550 locataires québécois de plus de 16 ans entre le 1er et le 18 mars 2023.