Assassinat de Claudia Iacono : même les gangs de rue ne sont pas tombés aussi bas
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Mardi dernier, en plein après-midi dans l’arrondissement de Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce, une femme est abattue à bout portant alors qu’elle était au volant de son véhicule.
La victime, dont le meurtre aurait été prémédité, est identifiée comme la belle-fille de Moreno Gallo, un Calabrais assassiné au Mexique en 2013 et connu comme un des trois mousquetaires de Joe Di Maulo.
Gallo était de la vieille garde des Cotroni qui, après la prise de pouvoir par les Rizzuto, a rejoint à contrecœur les rangs des Siciliens comme la grande majorité des Calabrais de l’époque. Il participera d’ailleurs au renversement des Rizzuto après l’extra-dition de Vito aux États-Unis pour un triple meurtre commis en 1981. La famille Gallo est donc bien connue dans le milieu mafieux.
Cependant, même au plus fort des guerres de la fin des années 1970 et de 2004-2013 entre les Siciliens et les Calabrais, jamais une femme ou un enfant n’avait été la cible intentionnelle d’une attaque pouvant causer la mort. Il est vrai que la veuve de Gallo avait déjà fait l’objet d’un enlèvement en 2019 et le commerce de Iacono a même été la cible d’un cocktail Molotov en 2015. Il n’en demeure pas moins que, depuis l’existence de la mafia italienne montréalaise, une règle informelle prévaut : on ne touche pas aux membres de la famille qui ne sont pas impliqués dans les affaires, particulièrement les femmes et les enfants.
Quel que soit le nom de celui qui a appuyé sur la gâchette (habituellement, ce genre de contrat est donné à des membres de gangs, comme cela a été le cas pour Leonardo Rizzuto), le plus important demeure le commanditaire.
Pourquoi a-t-il dérogé à cette règle qui faisait la marque de commerce de la mafia italienne de Montréal ? Un dangereux précédent !
Les femmes dans la mafia italienne
En Italie, de plus en plus de femmes sont impliquées ou responsables des affaires dans plusieurs familles mafieuses de la Cosa Nostra et de la ‘Ndrangheta. En 2018, elles représentaient près de 2,5 % des condamnées pour des crimes liés à la mafia.
Toutefois, à Montréal, les femmes sont mises à l’écart des activités criminelles, bien qu’elles soient bien au fait de la criminalité de leurs hommes. Elles profitent du confort financier et sont utilisées comme prête-noms. Plusieurs sont sous la coupe d’hommes violents et coureurs de jupons qu’elles ne peuvent pas dénoncer au risque de se mettre en danger ou de perdre leur train de vie.
Par ailleurs, elles vivent avec la peur constante d’apprendre la mort de leur conjoint ou de leurs enfants, en plus d’être potentiellement la cible de messages de clans adverses. Maintenant, ces femmes vont craindre de finir comme Claudia Iacono.
Palmina Cotroni
Dans mon livre, Milena Di Maulo. Fille et femme de mafiosi, je raconte l’histoire de ces femmes qui pour certaines ont su naviguer, d’autres pas, dans cet écosystème mafieux. L’une d’elles, bien qu’elle n’occupe que quelques lignes dans les annales de la mafia montréalaise, est sans aucun doute Palmina Cotroni Puliafito. Si elle n’avait pas été une femme, Palmina aurait été le parrain à la place de son frère, Vic. Elle était la personne la plus respectée, la plus écoutée, la plus solide. Les hommes baissaient les yeux devant elle ; ils n’osaient la décevoir ni la contrarier.
Elle qui était à cheval sur le code (autrement nommé Pizzino) doit se retourner dans sa tombe !