La facture du REM grimpe à un train d’enfer
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À l’origine, en 2015, le REM (Réseau express métropolitain) de la Caisse de dépôt et placement devait coûter 5,5 milliards de dollars. À l’aube de sa mise en service partielle, huit années plus tard, la facture totale du REM a royalement bondi.
En compilant les données dévoilées jusqu’à maintenant, la facture de la mise en circulation du REM, lorsqu’on inclut les contributions financières de tous les partenaires de la Caisse, est rendue à environ 8 milliards de dollars. En hausse ainsi de 45 % par rapport au projet initial.
Mais tenons-nous-le pour dit : y a rien là ! A-t-on déjà vu au Québec un vaste projet de construction publique se réaliser sans hausse majeure des coûts ? Non !
Et comme le mentionnait cette semaine La Presse, les coûts du REM vont peut-être même dépasser la barre des 9 milliards de dollars.
Qu’à cela ne tienne, l’homme fort du gouvernement Legault, le super ministre Pierre Fitzgibbon, n’est aucunement surpris.
Interpellant les journalistes, voici sa réaction devant la hausse des coûts du REM. « Est-ce que vous pensez qu’il y a beaucoup de projets aujourd’hui qui n’ont pas de dépassements de coûts ? Il n’y en a pas. Tous les projets ont des dépassements de coûts. Il faut être réaliste, on vit dans une période inflationniste. Il n’y a pas de projets qui n’ont pas eu de dépassements de coûts depuis deux ans. »
Bien des raisons expliquent la fabuleuse augmentation de la facture du REM. Il y a l’ajout de trois stations, portant ainsi à 26 le nombre de stations de ce nouveau réseau de métro léger de 67 kilomètres. Le REM reliera le centre-ville de Montréal, la Rive-Sud (Brossard), l’ouest de l’île, la Rive-Nord (Deux-Montagnes, Laval) et l’Aéroport Pierre-Elliott-Trudeau de Montréal.
Autres facteurs qui ont généré des dépassements de coûts ? Il y a bien entendu la fameuse pandémie de COVID-19, l’inflation et les mauvaises surprises reliées au piètre état du tunnel sous le mont Royal, là où le REM en provenance de Deux-Montagnes va passer pour se rendre au centre-ville de Montréal.
C’est également sans surprise que le ministre a appris que la mise en service du premier tronçon du REM (Brossard/centre-ville), laquelle était initialement prévue en 2021, était une fois de plus reportée de quelques semaines ou mois. L’ouverture du tronçon Deux-Montagnes/centre-ville est prévue en 2024 et celui de l’Aéroport/centre-ville en 2027.
LE PARTAGE DE LA FACTURE
La Caisse a beau être l’instigatrice-propriétaire du REM, son ambitieux projet de transport collectif a nécessité la participation financière des deux paliers de gouvernement.
Comme on peut le constater dans le tableau, sur les 8 milliards de dollars consacrés jusqu’à présent au REM, la Caisse s’est engagée à ce jour pour 3,5 milliards $ en équité, c’est-à-dire en capital-investissement.
Le gouvernement du Québec arrive au deuxième rang avec des engagements de 2,23 milliards $, dont 1,28 milliard $ en équité, 512 millions $ par l’entremise de l’ARTM, 435 millions $ en contributions financières connexes.
À cela s’ajoutent les dépenses d’Hydro-Québec reliées directement au réseau du REM, soit 338 millions $.
Troisième gros partenaire : le gouvernement fédéral qui a allongé 1,28 milliard $ à titre d’équité dans le REM.
Et l’autre importante contribution financière au REM de la Caisse vient cette fois de l’Aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau de Montréal qui va dépenser 600 millions pour la construction de la station reliant l’aéroport au REM.
RENTABILITÉ
Si la Caisse a injecté 3,5 milliards $ dans le REM, c’est dans le but de faire de l’argent avec ce placement. Elle vise au moins 8 % de rendement avec son investissement dans le REM lorsque celui-ci sera complété.
C’est donc dire que la Caisse compte encaisser bon an mal an la somme nette annuelle de 280 millions $.
Est-ce réalisable ? Eh oui, grâce à quoi ? À la structure financière qui a été mise sur pied pour lui permettre d’obtenir un tel rendement.
Selon l’analyste en transport Réjean Benoit, les prévisions d’achalandage sur lesquelles a été établi initialement le tarif par kilomètre parcouru avec le REM une fois complété sont très conservatrices.
Basé sur un achalandage de 608,8 millions de kilomètres parcourus lors de la première année normale, il est prévu que le coût du tarif par passager-kilomètre qui sera versé à la Caisse pour couvrir les frais d’exploitation du REM sera réparti comme suit : l’usager assumera 29,1 % du tarif, les municipalités, 16,7 % du tarif et le gouvernement du Québec, 54,2 %.
Concrètement, lors de la présentation de tarification du REM en 2021, celle-ci était basée sur un tarif de 72 cents le kilomètre-passager, dont la répartition était la suivante : 21 cents (usager), 39 cents (Québec), 12 cents (municipalités). Étant indexé, ce tarif grimpera annuellement à la hauteur de l’inflation.
Comme on peut voir, c’est le gouvernement du Québec qui financera en grande partie l’exploitation du REM lorsqu’il sera en service.
Et par conséquent, c’est grâce à Québec que la Caisse pourra encaisser un rendement annuel de 8 % sur son investissement de 3,5 milliards $.
Pour la Caisse, pas de doute que le REM représente un intéressant placement alors que le gouvernement du Québec en finance le rendement.
BILAN DE LA FACTURE DU REM
Caisse (capital-investissement)
3,5 milliards $
Fédéral (capital-investissement)
1,283 milliard $
Québec (capital-investissement)
1,283 milliard $
Québec (contribution via l’ARTM)
512 millions $
Québec (contributions connexes)
435 millions $
Contribution Hydro-Québec
338 millions $
Aéroport de Montréal (station)
600 millions $
7,95 milliards