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La nouvelle épidémie: crever de solitude

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Un fléau n’attend pas l’autre, me semble-t-il, depuis quelques années. Ici aux États-Unis, on s’entretue, on s’entre-contamine, on s’empoisonne la vie. Plus sournoisement, on se laisse tomber et on s’isole au point de s’en rendre malade. Avertissement aux cœurs solitaires !

Les scientifiques nous avaient prévenus que ce n’était qu’une question de temps avant qu’une crise mondiale de santé publique ne nous tombe sur la tête. Malgré tout, la virulence de la pandémie de COVID-19 nous a laissés stupéfaits : plus de 1,33 million de morts aux États-Unis ; près de 18 000 au Québec ; sept millions à travers le monde.

Les conséquences n’ont pas fini de se faire sentir. Des secteurs entiers de l’économie ont été bouleversés et peinent toujours à redémarrer. En mettant ensemble tous les élèves et les étudiants, ce sont des années de scolarité qui ont été dilapidées avec la fermeture des écoles. Nous sommes toutefois passés, avouons-le, à autre chose.

Les Américains le sont aussi ailleurs. Interrogés la semaine dernière sur les plus grandes menaces à la santé publique, à peine 3 % d’entre eux plaçaient la COVID-19 parmi les priorités. La violence armée s’est plutôt installée en tête de leurs inquiétudes.

UN RECORD QUI FAIT HONTE

Montréal a connu cette semaine ses huitième et neuvième homicides depuis le début de l’année, des chiffres désolants. Pour une population moitié moindre, la ville de Washington en est tristement rendue à 85 meurtres. Hier, au 139e jour de l’année, 227 fusillades de masse avaient été relevées à travers les États-Unis. On s’approche de deux par jour, un record affligeant.

Autre bilan lamentable, celui des victimes de surdoses de drogues et de médicaments : près de 110 000 morts, uniquement pour 2022. 

Le fentanyl, un opioïde synthétique souvent mélangé à des stimulants et à d’autres drogues, agit en véritable faucheur. Trois décès par surdose sur quatre sont dus aux opioïdes synthétiques.

NE ME LAISSEZ PAS MOURIR SEUL !

Au début du mois, le grand responsable de la santé publique aux États-Unis, le « Surgeon General » comme on l’appelle, a sonné l’alarme sur un autre risque pour la santé de ses compatriotes : la solitude. Une étude du ministère de la Santé et des Services humains montre que près de la moitié des Américains se sentent seuls ou isolés. 

Avec des conséquences physiques aussi réelles que pour la soif et la faim : 29 % de risques accrus de maladie cardiaque, 32 % pour les accidents vasculaires cérébraux et un risque accru de 50 % de développer une démence chez les personnes âgées.

Concrètement, selon le Dr Vivek H. Murthy, vivre dans la solitude pose un danger aussi mortel pour la santé que fumer jusqu’à 15 cigarettes par jour. Pas de doute à ses yeux, il s’agit de la toute nouvelle épidémie de santé publique. Les Beatles demandaient dans Eleanor Rigby il y a 57 ans (déjà !) : « All the lonely people, where do they all come from ? » (Tous les gens seuls, d’où viennent-ils ?) En fait, ils viennent de partout et sont, chaque jour apparemment, toujours plus nombreux autour de nous. 

Les plus grandes menaces à la santé publique aux États-Unis

  • Violence armée : 26 %
  • Opioïdes/fentanyl : 25 %
  • Obésité : 20 %
  • Cancer : 8 %
  • Tabagisme : 3 %
  • Accidents de la route : 3 %
  • COVID-19 : 3 %
  • Alcoolisme : 3 %

La solitude, une vraie épidémie 

  • 29 % : L’augmentation du risque de mortalité prématurée dû à l’isolement social.
  • 32 % : L’augmentation du risque d’accident vasculaire cérébral à cause de mauvaises relations sociales et de solitude. 
  • 50 % : L’augmentation du risque de développer une démence chez les personnes âgées vivant une solitude chronique. 
  • 70 % : La baisse du temps passé avec des amis par les jeunes de 15 à 24 ans depuis le début de la pandémie. 

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