Des couvercles contre la drogue du viol... et contre le vol
Si les femmes se font droguer pour les abuser, les hommes, eux, se font de plus en plus voler
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À l’intérieur de Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.
Deux établissements de la rue Saint-Laurent très à la mode chez les jeunes fêtards ont distribué gratuitement à leur clientèle des couvercles et des bracelets détecteurs de GHB, mieux connu sous le sobriquet «drogue du viol». De nombreux jeunes, hommes ou femmes, sont très conscients de ce danger en 2023, a remarqué Le Journal.
Les cercles chimiques du bracelet de test tournent au bleu foncé en présence de GHB.
Quant aux couvercles, ils compliquent la tâche de quiconque voudrait subrepticement introduire une substance dans le verre d’une victime potentielle.
Certains bars approchés aux fins de ce reportage, à qui je demandais d’essayer ces deux outils de prévention, ont préféré décliner par crainte d’être associés au phénomène fâcheux.
Le propriétaire des clubs Don B Comber et Le Rouge Bar, Jeff Blanchette, lui, a plutôt sauté sur l’occasion d’essayer ces produits encore peu communs.
«Mieux vaut faire face au problème que de le nier, et si on peut fournir quelque chose pour sécuriser notre clientèle, on va le faire», soutient-il.
Drogue disponible
Le GHB coûte peu cher, moins cher que la boisson dans un bar, et est fréquemment utilisé par des jeunes pour ressentir les effets de l’ivresse même en buvant très, très peu.
L’utilisation de la drogue comme substance rendant vulnérable administrée à des fins criminelles est plus rare, mais toujours possible.
«On vérifie les sacs à l’entrée, mais on ne fait pas de fouilles corporelles et c’est facile d’entrer avec une gélule ou une pilule de GHB», explique Chanel, la gérante du Don B Comber.
«On va distribuer le matériel autant aux hommes qu’aux femmes», ajoute-t-elle.
Pour faciliter le vol
«On voit de plus en plus souvent des hommes se faire droguer au GHB par des criminels qui en veulent à leur montre de luxe, à leur téléphone ou à leur porte-monnaie», affirme Josée Lacasse, la directrice adjointe d’Alco Prévention Canada, la compagnie qui fournit les couvre-verres et les bracelets.
«Une fois la victime droguée, même si c’est un costaud ou un dur à cuire, ça devient facile de lui subtiliser ses objets précieux sans rencontrer de résistance.»
«J’ai eu une mauvaise expérience il y a cinq ans, où je pense avoir été droguée au GHB, alors je garde toujours un œil sur les verres de mes clientes», me dit Lindsay, une barmaid du Rouge Bar.
Elle réalise une vidéo Tik Tok de ses premières clientes à poser des couvre-verre de silicone sur leurs verres à cocktail.
Rassurant
«Pas de GHB dans mon verre!» s’exclame Elodie Germond, une cliente du Don B Comber qui, par curiosité, analyse une goutte de sa boisson sur son bracelet.
«Nous sommes rassurées de savoir que ça existe, ces produits, et qu’on y a accès... ça envoie un message!» dit Flora Dinant.
Quelques jours après la fin de semaine d’essai, je rappelle M. Blanchette.
«L’expérience a été concluante, et nous offrirons ces produits en distributrice près des salles de bain en permanence, pas gratuitement pour éviter le gaspillage, mais au prix coûtant», dit-il.
Ces quelques couvercles et bracelets vont-ils avoir un impact? Souhaitons-le.