Michel Côté, c’était tout simplement un homme splendide
Martineau

C’était un homme splendide.
J’ai beau être hétérosexuel (note aux jeunes : ce mot qui est en train de tomber dans l’oubli désigne les hommes qui sont attirés par les femmes, il y en avait beaucoup dans les années 70), chaque fois que je le croisais dans une première, j’étais soufflé par sa prestance, son élégance, son assurance, son charme.
Nommez-moi un Québécois qui ne rêvait pas de ressembler à Michel Côté, et je vous montrerai un menteur.
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UN GRAND
Il avait beau avoir tout pour lui (la beauté, le talent, l’amour du public et une famille qu’il adorait), il ne vous regardait jamais de haut.
Comme l’a écrit Josélito Michaud sur sa page Facebook hier, Michel Côté était fier sans être vaniteux.
Ce n’est pas parce qu’on est grand (et qu’on est né à Alma, le centre du monde) qu’il faut faire sentir aux autres qu’ils sont petits, au contraire.
Et ce n’est pas parce qu’on peut jouer un père homophobe dans un film d’auteur acclamé par les critiques qu’on ne peut pas se mettre des fausses dents et des perruques à cinq sous pour incarner des tarlas aux yeux croches dans une farce tagada-tsouin-tsouin.
Il n’y a pas de sot public.
Sur ce point, Michel Côté était comme Michel Serreault : aussi à l’aise dans un drame psychologique que dans une pièce de boulevard, autant dans la peau de Pierre Gauthier, l’enquêteur viril d’Omertà, que dans celle de Pointu, Serge ou Jean-Lou.
(D’ailleurs, parlant de Jean-Lou, le gai efféminé qui ferait passer Christian Lalancette pour Mad Dog Vachon : je regardais la télé, hier, et je voyais des extraits de La petite vie diffusés sans aucun avertissement!
Êtes-vous fous? Avez-vous pensé à la santé psychologique de nos enfants? Vite, une plainte au CRTC! Ça devait courir dans les couloirs de Radio-Canada...)
- Josélito Michaud raconte son admiration pour Michel Côté à l'émission de Richard Martineau, disponible viaQUB radio :
LA POLITESSE DES ROIS
J’ai vu Broue trois fois.
Quelques jours après sa création, au minuscule Théâtre des Voyagements, en mars 1979, puis quelques années plus tard devant une foule nombreuse.
Michel Côté a dû jouer Broue plus souvent que Daniel Pinard n’a prononcé les mots «piments d’Espelette».
Pourtant, il n’était jamais sur le pilote automatique.
Oh, il pensait peut-être à sa liste d’épicerie, mais ça ne paraissait pas. Il avait trop le respect du public pour s’économiser.
«L’exactitude est la politesse des rois», dit l’adage.
La générosité aussi.
Le désavantage de vieillir, c’est qu’on voit nos idoles disparaître les unes après les autres.
Malheureusement, au Québec, on a si peu de mémoire qu’il faut écrire «Je me souviens» sur nos plaques d’immatriculation pour se rappeler de se souvenir.
Comme un cinéaste souffrant d’Alzheimer qui écrit son nom dans la manche de son manteau.
C’est à nous de garder la flamme allumée.
C’est bien beau, raser les maisons patrimoniales pour construire des pharmacies, des caisses pop ou des bars de danseuses en tôle ondulée, mais ça ne fait pas une culture forte.
Moi, j’ai eu la chance de voir Michel Côté en personne.
Et j’espère que nos petits-enfants auront la chance de le voir sur les écrans qu’ils se feront poser dans la cornée.
C’était, tout simplement,
un homme splendide.