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Défense: l’approvisionnement de nos soldats en nouvelles technologies est si lent qu’il nous met en danger

Défense: l’approvisionnement de nos soldats en nouvelles technologies est si lent qu’il nous met en danger
Forces armées canadiennes


OTTAWA – L’approvisionnement de nos soldats en nouvelles technologies est si lent qu’il nous met en danger dans un monde en proie à une véritable guerre technologique dopée par l’intelligence artificielle (IA), préviennent les experts. 

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«En IA, tous les deux jours il y a une découverte équivalente à celle de la télévision, ça va extrêmement vite. Si on n’a pas ces technologies, on ne sera pas capables de se protéger», prévient Patrick St-Amand, co-fondateur de Zetane Systems, une jeune entreprise montréalaise qui développe des outils d’IA pour la défense.

M. St-Amand était cette semaine au salon de l’industrie de la défense, CANSEC, pour présenter ses innovations. Autour de lui, des dizaines de développeurs se spécialisant comme lui dans l’IA étaient présents.

C’est le cas d’une autre jeune entreprise, de Vancouver, qui se sert de l’IA pour trier et analyser des masses de données visuelles en temps réel et y localiser des menaces. L’entreprise TerraSense bénéficie du soutien financier de la Défense canadienne, qui estime que ses innovations pourraient permettre de relever certains des défis les plus difficiles en matière de défense et de sécurité.

Mais même si les unités de recherche de l’armée canadienne portent un intérêt grandissant à ces innovations, sur le terrain, nos soldats sont face à un problème de taille: le système d’acquisition de la Défense nationale est trop lent pour leur fournir de nouveaux outils au rythme accéléré de leur développement.

Déjà en retard

«La lenteur de notre approvisionnement militaire, c’est le plus gros problème. Si ça ne change pas, on va se faire complètement dépasser par des pays qui ne partagent pas notre système démocratique et les dangers sont assez exceptionnels», insiste M. St-Amand.

Le ministre de l’Innovation, François-Philippe Champagne, l’a lui-même avoué devant un parterre de grands patrons de l’industrie de la défense jeudi : le gouvernement «doit faire mieux en approvisionnement», afin de s’assurer d’«acheter les technologies de demain dès aujourd’hui», a-t-il dit.

Défense: l’approvisionnement de nos soldats en nouvelles technologies est si lent qu’il nous met en danger
Francois-Philippe Champagne, ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie SIMON CLARK/JOURNAL DE QUÉBEC/AGENCE QMI Simon Clark/Agence QMI

«Il faut avoir un système d’acquisition qui rentre dans le 21e siècle, c’est-à-dire qui soit conscient de l’environnement géostratégique dans lequel on évolue», a-t-il ensuite indiqué au Journal.

Mike M. McGuinty de TerraSense souligne que le Canada a un «devoir moral» de développer ces technologies pour nous protéger parce que des États adversaires, comme la Chine, le font déjà. La guerre du futur est déjà bien engagée.

La Chine a déjà surpassé les États-Unis dans le nombre d’articles scientifiques publiés au sujet de l’IA. Elle détient aussi les cinq plus importants laboratoires au monde spécialisés dans la vision, une technologie particulièrement pertinente pour un État de surveillance.

Dans le brouillard

Si l’IA intéresse autant les militaires, c’est qu’elle permet de «traiter et d’analyser des quantités massives de données à une vitesse et une précision dépassant largement les capacités humaines», écrit le major Geoffrey Priems du centre de guerre terrestre de l’Armée canadienne.

Et justement, l’armée est submergée de données. Selon une estimation, la quantité de données recueillies uniquement par les drones militaires et d’autres technologies de surveillance a augmenté de 1600% entre 2001 et 2012, note la firme Deloitte.

«Depuis longtemps, on parle du brouillard de la guerre causé par la masse d’information. Ce brouillard s’épaissit de plus en plus vite. Avec l’IA, on essaie de faire la lumière dans la brume», illustre M. McGuinty.

Comment la technologie nous protège

Le Journal a visité le salon de l’industrie de la défense, CANSEC, à Ottawa, pour voir les innovations qui équipent ou équiperont bientôt nos soldats.

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Le casque révolutionnaire de l'avion de chasse F-35. Collins Aerospace

Le casque des pilotes de l’avion de chasse F-35 est fabriqué par la compagnie ontarienne Collins Aerospace. Il permet aux pilotes de voir à travers le cockpit dans toutes les directions grâce aux caméras infrarouges intégrées dans le maillage de l’avion. Tous les instruments de navigation sont aussi projetés à l’intérieur du viseur, ce qui permet au pilote de toujours garder les yeux dessus, sans avoir à baisser le regard sur son tableau de bord. Les pilotes des 88 F-35 que recevront les Forces armées canadiennes en seront tous équipés.

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Drone de transport utilisé par les Forces armées canadiennes Avidrone

Les Forces armées canadiennes utilisent des drones de transport mis au point par la compagnie Avidrone aerospace, basée à Waterloo en Ontario. Les plus puissants peuvent parcourir jusqu’à 724 km et transporter une charge de 227 kg. Ces engins permettent de faire des économies allant jusqu’à 80% par heure de vol comparativement à un vol par hélicoptère. Ils permettent de livrer du matériel de secours ou du ravitaillement par exemple, dans des secteurs reculés impossibles d’accès par avion ou hélicoptère.

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Anthony Marcil et Etienne Lamoureux sont les concepteurs de l'exosquelette d'assistance musculaire qu'ils portaient au salon de l'industrie de la défense, CANSEC, à Ottawa. Anne Caroline Desplanques - Le Journal de Montréal

La compagnie Mawashi, basée à Saint-Jean-sur-Richelieu, met au point des exosquelettes d’assistance musculaire pour prévenir les troubles musculosquelettiques. En plus de réduire les risques de blessures, le système réduit l’effort de 20% et la résistance de 40%. En le portant, on peut donc déplacer de plus lourdes charges pendant plus longtemps. Les concepteurs espèrent que leur système permettra bientôt d’alléger le fardeau des soldats qui sont appelés à transporter tout leur équipement sur leur dos pendant de longues périodes. Il est déjà utilisé par le Groupe d’intervention de la Gendarmerie nationale (GIGN), l’unité d’élite de la Gendarmerie nationale française.

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Drone de surveillance Edge Autonomy

L’armée américaine utilise des drones de la compagnie californienne Edge Autonomy capables de voler en toute autonomie pendant 8 h 30 min et de parcourir 150 km sur une charge. Ils sont munis de caméras si puissantes qu’ils peuvent transmettre des images parfaitement claires d’objets situés aussi loin qu’à 3 km d’eux, ce qui les rend impossibles à repérer. Fabriqués à Riga, en Lettonie, ils sont testés en conditions arctiques et seraient donc capables de soutenir le Canada dans la surveillance de ce territoire. La compagnie ne parvient cependant pas à percer les dédales de notre système d’approvisionnement militaire.

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