L’administration Biden et le profilage d’un maire musulman
Cette histoire est un peu passée sous le radar, mais elle pourrait être gênante pour une administration qui, comme celle d’Obama, attirait un nombre considérable d’électeurs musulmans.
Le maire de Prospect Park au New Jersey, Mohamed Khairullah, doit déposer lundi des accusations à l’endroit de l’administration Biden. Il considère qu’on cible de manière abusive les musulmans.
Une communauté plus proche des républicains
Si on recule à l’élection de 2000, la communauté musulmane des États-Unis avait appuyé George W. Bush à hauteur de 70%. Plus conservateurs économiquement et socialement, les musulmans constituaient une clientèle politique acquise.
Le discours républicain qui met de l’avant des valeurs familiales, le mariage traditionnel et l’opposition au recours à l’avortement avait tout pour les séduire. Souvent propriétaires de petites entreprises, ils étaient tout aussi sensibles à la diminution des taxes proposées par le GOP.
Dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001, le vote de la communauté musulmane s’est inversé. Éprouvée par la vague d’islamophobie qui a suivi, elle a ensuite associé les républicains à des politiques antimusulmanes.
Un silence suspect
Arrivé aux États-Unis en 1980 en provenance de la Syrie, le démocrate Mohamed Khairullah est maire de Prospect Park depuis 2005.
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Au cœur de la poursuite qu’il intente figure l’annulation soudaine d’une invitation à la Maison Blanche pour souligner l’Aïd al-Fitr, la rupture du jeûne du mois du ramadan. Khairullah allègue qu’on ne lui a jamais présenté les motifs de son exclusion.
Interrogée à de nombreuses reprises lors de l’incident, la porte-parole de la Maison Blanche Karine Jean-Pierre redirigeait les journalistes vers les Services secrets américains et le FBI. Dans un cas comme dans l’autre, c’est le silence presque complet.
Une liste controversée et du profilage
L’administration Biden s’est fait un point d’honneur de lutter contre l’islamophobie qui sévit aux États-Unis. Même si le poids politique de la communauté musulmane n’est pas considérable, bien des progressistes pourraient être contrariés si les accusations de Khairullah s’avéraient.
Si je ne dispose pas encore de l’acte d’accusation, le maire y affirmerait qu’il y a une liste de suspects (en lien avec le terrorisme) majoritairement musulmans sur laquelle figure également son nom. Celui qui dirige Prospect Park depuis bientôt 18 ans veut savoir ce qu’on lui reproche.
La liste à laquelle il renvoie a été élaborée en 2003 par l’administration Bush, jugée illégale en 2019, avant d’être autorisée à nouveau en 2021. Cette même liste expliquerait qu’on l’ait interrogé à l’aéroport JFK de New York et qu’on l’ait brièvement détenu à son retour du Canada en 2021.
Si selon le jugement de 2021 le gouvernement doit jouir d’une grande latitude pour assurer la sécurité des Américains, ceux-ci sont une fois de plus confrontés aux limites du respect des droits garantis par la constitution.
Mohamed Khairullah ne parviendra pas à faire invalider la liste, mais il en saura peut-être un peu plus sur les motifs qui justifient qu’il y figure.
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