
Chasse-galerie
rentre à la maison
Après avoir fait la navette entre Montréal, New York et Los Angeles pendant plusieurs années pour tourner dans des films et des séries télé américaines, Caroline Dhavernas fait un retour marqué au petit et au grand écran québécois. En plus de jouer un des rôles principaux de la série télé Blue Moon, l’actrice tient la vedette de Chasse-galerie: la légende, le film québécois le plus attendu de ce début d’année.
Mine de rien, Caroline Dhavernas n’avait pas joué le premier rôle d’un film québécois depuis Mars et Avril, en 2012. Très occupée ces dernières années par des tournages américains (le plus récent en lice étant la série télé Hannibal, diffusée à NBC de 2013 à 2015), la comédienne de 37 ans souhaitait depuis longtemps retrouver les plateaux québécois.
«Je crois que les gens ont pensé pendant longtemps que je vivais à temps plein à New York», confie-t-elle, en entrevue au Journal.
«J’ai passé beaucoup de temps au cours des dernières années à expliquer que j’habitais ici depuis toujours et que même quand j’étais à New York, je gardais toujours un pied-à-terre à Montréal. Ç’a pris du temps, mais je crois que le message a finalement été entendu. J’ai l’impression que toutes les petites graines que j’ai semées pendant les dernières années portent leurs fruits aujourd’hui. Et ça me rend heureuse.»
Caroline Dhavernas ne cache pas aussi que ses priorités ont changé au fil des années. Il y a une dizaine d’années, elle consacrait beaucoup de temps et d’énergie à sa carrière d’actrice à Hollywood. Aujourd’hui, elle dit aborder différemment son travail.
«Dans ma vingtaine, j’ai beaucoup travaillé à bâtir une carrière aux États-Unis et pour faire cela, il faut être sur place», admet-elle.
«Dans ma trentaine, j’ai toujours envie de tourner et de travailler à l’étranger, mais je m’aperçois que j’ai passé beaucoup de temps seule dans des chambres d’hôtel à me dire que mes amis et ma famille me manquent.
«C’est bien beau le travail, mais je pense qu’à 30 ans, on s’aperçoit qu’on a besoin d’être nourri par autre chose que seulement le travail. C’est pour ça aussi que j’ai eu envie de revenir travailler davantage au Québec. Aujourd’hui, je n’ai même plus de logement à New York. J’habite sur le Plateau, à Montréal. Je veux continuer à tourner à l’étranger si de beaux projets se présentent, mais ma vie est ici, au Québec.»
«L’idée est de trouver le bon équilibre. J’ai toujours su que je serais malheureuse comme une pierre à être seule à Los Angeles pour faire avancer ma carrière. J’ai besoin d’être dans un endroit où je suis entourée de gens que j’aime et où je peux avoir une vie sociale.»

Combattre le froid
Comme la célèbre légende dont il s’inspire, le film Chasse-galerie raconte l’histoire d’un groupe de bûcherons qui décident de vendre leur âme au diable pour aller retrouver leurs familles dans leur village pendant la nuit du jour de l’An. Aidés par des forces obscures, ils feront le voyage à bord d’un canot volant.
Caroline Dhavernas joue dans le film la mercière du village, Liza Gilbert, l’amoureuse du chef des bûcherons (Francis Ducharme).
L’actrice admet qu’elle connaissait peu de choses de la légende quand elle a été approchée pour jouer un rôle dans ce film réalisé par Jean-Philippe Duval (Dédé à travers les brumes) et scénarisé par Guillaume Vigneault (Tout est parfait).
«J’ai lu la version d’Honoré Beaugrand (publiée en 1891), mais mon premier vrai contact avec la légende a été le scénario du film, indique-t-elle.
«J’ai aimé le fait que Jean-Philippe voulait raconter cette histoire en préconisant une approche très réaliste. Il voulait que ce soit dur et sale, comme dans le temps. On a joué sans maquillage et dans un froid intense. On a tourné en février 2015, qui a été apparemment le mois de février le plus froid en plus de 100 ans.
«Les gars qui jouent les bûcherons ont particulièrement souffert en tournant dans le bois en pleine nuit à -40 °C. Je trouve que ça fait un effet très réaliste à l’écran. La buée qu’on voit sortir de nos bouches quand on parle, c’est tout vrai. C’était difficile comme conditions de tournage, mais ça nous a soudés comme équipe. On sentait qu’on était des battants, comme les personnages du film.»
Chasse-galerie: la légende prend l’affiche le 26 février.

en cinq rôles importants
Lost and Delirious
2001
Après des performances remarquées dans les séries télé Zap et Tag, Caroline Dhavernas obtient un rôle aux côtés de Jessica Paré, Piper Perabo et Mischa Barton dans ce drame anglophone de Léa Pool qui lui ouvre déjà quelques portes aux États-Unis.
Wonderfalls
2004
À 25 ans, Caroline Dhavernas décroche le rôle principal de cette série télé qui doit être diffusée sur les ondes de la chaîne américaine Fox au printemps 2004. Mais malgré des critiques élogieuses, la série est retirée des ondes après seulement quatre épisodes à cause de cotes d’écoute jugées décevantes. Wonderfalls a toutefois eu droit à une seconde vie grâce à un coffret DVD.
Hollywoodland
2006
Même si la série n’a pas obtenu le succès escompté, Wonderfalls permet à Caroline Dhavernas de décrocher quelques rôles importants à Hollywood, dont un dans le film policier Hollywoodland, aux côtés d’Adrien Brody et de Ben Affleck. On la voit aussi dans le thriller Breach (2007), avec Ryan Philippe.
De père en flic
2009
Après avoir travaillé avec Émile Gaudreault dans le film Surviving My Mother, Caroline Dhavernas retrouve le cinéaste québécois sur le plateau de la comédie policière De père en flic, un des plus gros succès du cinéma québécois. Une suite est actuellement en préparation, avec le même groupe d’acteurs, y compris elle-même, Louis-José Houde et Michel Côté.
Hannibal
2013
Après les expériences de Wonderfalls, The Pacific (2010) et Off The Map (2011), Caroline Dhavernas est de retour à la télévision américaine avec cette série développée autour du célèbre personnage d’Hannibal Lecter. La série a eu droit à trois saisons de 13 épisodes, diffusées de 2013 à 2015 sur les ondes de NBC.
Ne cherchez pas de magie noire ou de diable avec des cornes rouges dans le film Chasse-galerie. C’est une adaptation très réaliste de la célèbre légende québécoise que le cinéaste Jean-Philippe Duval a voulu porter à l’écran avec son film.
Qui n’a pas déjà entendu la légende de la Chasse-galerie? Cette histoire qui raconte les péripéties d’un groupe de bûcherons qui font un pacte avec le diable pour aller rejoindre leurs familles pendant la nuit du jour de l’An a été racontée des milliers de fois autour de feux de camp et dans les classes d’écoles primaires.
La légende a notamment inspiré une chanson de Claude Dubois et un court métrage d’animation produit par l’ONF en 1996. Mais il aura fallu attendre 2016 avant que cette histoire soit finalement racontée sur grand écran.
«À la SODEC, ils m’ont déjà dit qu’il y avait eu, au fil des années, plusieurs projets d’adaptation de la Chasse-galerie qui avaient été présentés, mais aucun d’entre eux ne s’était concrétisé. À une certaine période, Gilles Carle avait lui aussi manifesté le désir d’en faire un film. Ç’a donc été une longue saga avant qu’un film sur la légende voie le jour», résume Jean-Philippe Duval qui a réalisé il y a quelques années le film Dédé à travers les brumes, sur la vie de Dédé Fortin.
Duval lui-même avait déjà caressé l’idée de faire un film sur la Chasse-galerie alors qu’il étudiait à l’école de cinéma, en 1988.
«Mon père a fait une maîtrise sur les légendes québécoises, alors j’ai grandi en me faisant raconter les histoires de la Chasse-galerie et de la Corriveau», explique le cinéaste.
«Pour moi, ces légendes permettent d’abord et avant tout de raconter notre histoire et d’où on vient. Je crois que c’est important de transmettre d’une génération à l’autre ces histoires qui font partie de notre imaginaire collectif.
«La légende de la Chasse-galerie a une grande valeur historique parce qu’elle se déroule à la fin du 19e siècle, au début des bûcherons. Je voulais donc en faire un film qui a de la gueule, mais qui soit aussi ancré dans la réalité de l’époque et qui montre les conditions difficiles des bûcherons de l’époque. Ça faisait partie de nos responsabilités de bien respecter les aspects historiques du film.»
Comme de vrais bûcherons
C’est d’ailleurs par souci de réalisme que Jean-Philippe Duval a fait construire un vrai camp de bûcherons dans le bois, afin que les acteurs du film puissent avoir une idée du quotidien des bûcherons de l’époque.
«Les producteurs auraient préféré qu’on tourne ces scènes en studio, mais j’ai refusé. Le tournage a été complexe et exigeant à cause du froid extrême (jusqu’à - 40 °C) et des nombreuses scènes de nuit, mais ça valait la peine de souffrir. Ce n’était pas facile pour les acteurs de tourner dans le froid, mais ça donne une vérité à leur jeu. Ils ont dit qu’on avait eu l’an passé le mois de février le plus froid depuis 115 ans. Ça tombait bien, l’histoire qu’on racontait se déroulait il y a environ 115 ans!»
Moins fantaisiste
Même s’il souhaitait depuis longtemps tourner un film sur la Chasse-galerie, Jean-Philippe Duval a d’abord refusé le projet quand les producteurs lui ont présenté une première version du scénario (écrite par Mario Bolduc), il y a quelques années. «C’était une approche plus comique et plus fantaisiste de l’histoire qui m’intéressait moins, admet-il.
«J’ai proposé aux producteurs de réécrire un scénario et j’ai fait appel à Guillaume Vigneault (Tout est parfait) pour l’écrire. À partir de l’histoire écrite par Honoré Beaugrand (publiée en 1891), on a développé des personnages et on a brodé une histoire d’amour autour de laquelle on a construit le scénario.
«On s’est beaucoup questionné aussi sur la façon dont on voulait aborder le mal. Contrairement à la légende, il n’y a pas de diable dans le film. Le méchant de l’histoire est plutôt un homme d’affaires anglais (joué par François Papineau) qui installe sa malédiction sur un village. Il n’y a pas vraiment de magie dans le film. Même la scène du canot volant a été tournée avec un souci de réalisme. Il ne vole pas dans les airs comme Harry Potter sur son balai. Les bûcherons travaillent pour faire avancer le canot comme si c’était dans l’eau.»
Chasse-galerie : la légende prend l’affiche le 26 février.