


La colombe
La Céline Dion de 1984 est bien loin d’être la star internationale qu’on connaît aujourd’hui. Âgée de 16 ans, l’adolescente compte peu d’années de métier, mais elle vient déjà de lancer son sixième album au Québec, Mélanie. Le disque comprend une chanson qu’elle rendra célèbre en l’interprétant lors du passage du pape Jean-Paul II au Stade olympique de Montréal. Le 11 septembre, Céline Dion, sélectionnée pour représenter «la jeunesse du Canada», s’inscrit dans l’histoire en livrant la ballade avec aplomb devant non seulement le souverain pontife, mais 65 000 personnes. Ce moment marquera les Québécois. Une colombe remportera deux trophées au Gala de l’ADISQ: 45-tours le plus vendu et Chanson de l’année.

Unison

Céline Dion entame sa grande conquête du marché anglophone. Lancé en avril, le disque Unison connaît un départ timide au Canada à cause du succès mitigé du premier extrait, la ballade (If There Was) Any Other Way. Les choses changent radicalement aussitôt que paraît le deuxième extrait du disque, la bombe dansante Unison, au mois d’août. Le vidéoclip en noir et blanc nous présente une nouvelle Céline Dion, plus sexy. La version radio du titre comprend même une portion rappée, gracieuseté de Frankie Fudge. Quelques semaines plus tard, pour marquer la sortie de Unison aux États-Unis, Céline Dion fait sa première apparition télé chez nos voisins du sud. Le 21 septembre, elle chante la ballade Where Does My Heart Beat Now au Tonight Show, animé par Jay Leno.

Le phénomène D’eux
En voie de devenir le disque francophone le plus vendu de tous les temps, D’eux continue de trôner au sommet des palmarès en juillet 1995, trois mois après sa sortie. Alors que Pour que tu m’aimes encore commence à s’essouffler à la radio, Céline Dion choisit de promouvoir un deuxième extrait, Je sais pas. Loin d’être une chanson typique d’été, la ballade composée par Jean-Jacques Goldman obtient néanmoins un succès monstre. Au Québec, au dévoilement des nominations au Gala de l’ADISQ, la chanteuse récolte plusieurs mentions. Céline Dion profite également des mois d’août et septembre pour préparer une tournée en français durant laquelle elle donnera 42 spectacles à guichets fermés dans 11 pays. Elle lancera cette importante série de concerts au Capitole de Québec.

Les Jeux olympiques
Quelques mois après la sortie de Falling Into You, un disque anglophone qui s’écoulera à 32 millions d’exemplaires et remportera le prix du meilleur album de 1996 aux Grammy, Céline Dion enchaîne les concerts en Amérique du Nord, incluant trois représentations au Centre Molson de Montréal. Le 19 juillet, elle prend une pause de la tournée pour participer aux grandes célébrations d’ouverture des Jeux olympiques d’été d’Atlanta. Dans un stade rempli à craquer (85 000 personnes) et devant 3,5 milliards de téléspectateurs, elle interprète The Power of the Dreams, une ballade signée David Foster et Kenneth «Babyface» Edmonds. C’est d’ailleurs le président des États-Unis lui-même, Bill Clinton, qui avait suggéré le nom de Céline Dion aux organisateurs du rendez-vous. Deux semaines après cette consécration, la diva de Charlemagne lance le deuxième extrait de Falling Into You, la ballade It’s All Coming Back To Me Now, pour laquelle elle vient de tourner un somptueux vidéoclip à Prague, en République tchèque. Céline Dion n’a jamais été aussi populaire.

Le Stade de France
En plein cœur d’une fructueuse tournée mondiale qu’elle bouclera le 31 décembre au Centre Molson, la chanteuse se paie le Stade de France… Non pas une fois, mais deux fois. Ces représentations rallient un total de 180 000 personnes en délire, qui expriment leur amour pour Céline Dion à coup d’ovations assourdissantes. Dans une mise en scène à 360 degrés, la star propose plusieurs extraits de S’il suffisait d’aimer, son album francophone paru l’été précédent. L’interprète en profite pour enregistrer un disque live intitulé Au cœur du Stade. L’album sort au mois d’août et s’écoulera à plus de deux millions d’exemplaires. Au début du mois de septembre, elle amène son Let’s Talk About Love World Tour au Québec. Ses deux concerts à Montréal attirent près de 42 000 amateurs et enregistrent des recettes de 1,4 million $. Avant de s’éclipser pour donner le jour à son premier enfant, la future maman fait le plein d’apparitions publiques.

Les plaines
Neuf ans après avoir promené son Let’s Talk About Love World Tour aux quatre coins du monde, Céline Dion reprend la route en 2008. La chanteuse délaisse temporairement Las Vegas et entreprend une tournée mondiale pour promouvoir son nouvel album, Taking Chances. Au cœur de cette série de 132 concerts qui enregistrera finalement des recettes de 280 millions $US, la superstar s’arrête à Québec pour offrir un spectacle unique devant 250 000 personnes. Le 22 août, la diva prend les plaines d’Abraham d’assaut en compagnie d’une douzaine d’invités spéciaux, dont Ginette Reno, avec qui elle livre une puissante relecture d’Un peu plus haut, un peu plus loin pour clôturer la soirée. Toujours en août, Céline se paie le Centre Bell à huit reprises, rassemblant au passage 168 000 fans.

Le retour
Après avoir mis sa carrière en veilleuse durant un an pour prendre soin de René Angélil, qui combat un nouveau cancer, Céline Dion reprend sa résidence à Las Vegas. Entourée d’une équipe renouvelée, la mère de trois enfants foule les planches du Colosseum du Caesars Palace pour exaucer le vœu de René, qui souhaite la revoir sur scène avant de mourir. Très médiatisé, ce retour au show-business s’avère particulièrement émotif pour l’étoile: soir après soir, elle doit interpréter des chansons qui – en raison des problèmes de santé de René Angélil – prennent une tout autre signification, comme All By Myself et My Heart Will Go On. C’est également en août que Céline Dion lance L’hymne, un duo avec Fred Pellerin qui accompagnera la sortie du film d’animation La guerre des tuques 3D.

Depuis quelques semaines, tout le monde parle d’une «nouvelle Céline Dion». Selon les médias internationaux, la chanteuse a beaucoup changé. Même ses admirateurs le pensent : la Céline Dion de 2016 n’est plus celle de 2015… ou des années précédentes, tout compte fait. Les manifestations d’une star transformée sont effectivement nombreuses. Entre un coton ouaté du Titanic, deux événements Facebook en direct et trois photos sur Instagram, la diva de Charlemagne nous surprend de plus en plus. Mais peut-on vraiment parler d’une métamorphose?
Le changement le plus radical s’est certainement opéré du côté des réseaux sociaux. Jusque-là très peu active sur Facebook, Twitter et compagnie, la chanteuse a effectué un virage à 180 degrés au cours des 12 derniers mois. En atterrissant en France le mois dernier, elle a partagé sur Instagram une publication dans laquelle elle saluait son public en compagnie de René-Charles, Eddy et Nelson. Avant de fouler les planches du AccorHotels Arena de Paris, quelques jours plus tard, elle nous montrait sa loge dans une courte allocution en direct sur Facebook. La vidéo de 60 secondes a été vue plus de 3 700 000 fois depuis. Et c’est sans compter la captation des 40 premières minutes du dernier concert en Europe et celle du touchant hommage posthume à René Angélil à Las Vegas en février. Il va sans dire, Céline Dion s’ouvre de plus en plus sur internet.
Selon Bruno Guglielminetti, conseiller en communication, la chanteuse de 48 ans a «modernisé» son approche. «Avant, elle préférait un mode de communication plus traditionnel, indique
M. Guglielminetti. Aujourd’hui, puisque son nom est devenu une marque, elle doit être présente sur toutes ces plateformes. Les grandes vedettes ne peuvent pas négliger cet aspect du métier. Ça fait partie de l’équation. C’est dans l’air du temps.»
En effet, les pop stars du 21e siècle cherchent avidement des abonnés. Depuis quelques années, Billboard publie même son Social 50, un classement hebdomadaire des artistes les plus populaires sur Facebook et compagnie. Avec 524 000 abonnés sur Twitter, 23 millions de «J’aime» sur Facebook et 864 000 admirateurs sur Instagram, Céline Dion arrive peut-être loin derrière Katy Perry (90 millions sur Twitter) et Taylor Swift (86 millions sur Instagram), mais elle répond désormais présente. «Ça lui permet d’annoncer des choses, de corriger des perceptions, de contrôler son image, de nourrir ses fans et d’aller au-devant des choses», déclare Bruno Guglielminetti.

Un look revampé
Céline Dion n’a pas seulement modifié son approche des médias sociaux récemment. Sa garde-robe a aussi subi une transformation-choc. Habillée durant plusieurs années par Annie Horth, la superstar fait désormais confiance à Law Roach, un styliste américain ayant travaillé avec Ariana Grande et Zendaya. Cette nouvelle – et fructueuse – association nous a déjà donné l’un des moments mode de 2016, le coton ouaté du Titanic à 1150 $ qu’elle a porté à Paris au début du mois et dont on parle encore aujourd’hui. Jamais on n’aurait aperçu Céline Dion avec un tel chandail il y a quelques années, ont noté divers blogues de mode réputés.
En chanson
La transformation de Céline Dion paraît toutefois moins évidente sur disque. Son dernier simple en anglais paru en mai, une reprise du célèbre The Show Must Go On du groupe Queen, faisait déjà partie des chansons qu’elle interprétait sur scène. Non seulement à Las Vegas, mais durant son Taking Chances World Tour de 2008, fait remarquer Mike Gauthier, chroniqueur musique et agent d’artistes, qui suit attentivement la carrière de Céline Dion depuis plusieurs décennies.
En français, le premier extrait du disque qui sortira le 26 août, Encore un soir, a été composé par Jean-Jacques Goldman, un complice de longue date, ayant notamment été l’architecte du méga-succès de l’album D’eux en 1995. «La nouvelle Céline Dion, je ne l’ai pas encore entendue», confie Mike Gauthier, qui avoue toutefois être curieux d’entendre certaines des collaborations annoncées dans son prochain opus francophone, comme celles avec Zaho, une auteure-compositrice d’origine algérienne. Les Français Florent Mothe et Mutine font aussi partie des nouvelles recrues du clan Dion, au sein duquel figurent toujours de fidèles alliés comme Jacques Veneruso (auteur de Sous le vent) et Marc Dupré.
La véritable transformation musicale aura-t-elle lieu en anglais, sachant que Pink a déjà écrit pour l’album prévu pour 2017? Peut-être. «Il y a quelques années, jamais on n’aurait pensé que Céline Dion ferait quelque chose avec Pink tellement elles sont dans des carcans différents, observe Mike Gauthier. Donc tout est possible.»